Enfants d’Équateur

Concrétiser les droits de l’enfant en Équateur

Le gouvernement équatorien a signalé son ferme engagement à protéger les droits des enfants : il a ratifié des traités internationaux et mis en œuvre des politiques au niveau national. Le taux d’achèvement scolaire reste exceptionnellement élevé dans ce pays qui adopte régulièrement de nouvelles stratégies pour renforcer la protection de l’enfance. Cependant, la violence envers les enfants, le travail des enfants et de mauvaises conditions sanitaires locales fragilisent les progrès qui devraient aller de pair avec ces efforts, et les enfants ne peuvent toujours pas jouir de tous leurs droits fondamentaux.

Indice des Droits de l’Enfant: 7,51 / 10
Niveau orange :
Problèmes sensibles

Population : 18,1 millions
Pop. de 0 à 14 ans : 27,4%

Espérance de vie : 77 ans
Mortalité des moins de 5 ans : 13 ‰

L’Équateur en un coup d’œil

La République de l’Équateur (República del Ecuador en espagnol ou Chawpipacha Ripuwlika en quechua), dont Quito est la capitale, est un pays du nord-est de l’Amérique du Sud situé sur l’équateur, d’où son nom. Il partage ses frontières avec la Colombie au nord, le Pérou à l’est et au sud et l’océan Pacifique à l’ouest. Il comprend également l’archipel des îles Galápagos (Archipiélago de Colón) dans l’océan Pacifique. 

Géographiquement, le pays (sans compter l’archipel) est divisé en trois régions physiques principales : La Amazoniá ou El Oriente (région orientale), La Costa (région côtière), et La Sierra (région montagneuse) qui est traversée par une partie de la cordillère des Andes (Vélez, 2021). Le pays compte neuf parcs nationaux, dont les îles Galápagos. Les dix-huit îles qui forment cet archipel abritent une grande variété de plantes, d’oiseaux et de reptiles. Comme l’a observé Charles Darwin, la biodiversité de l’Équateur est une des plus uniques au monde, comptant 25 000 espèces de plantes et 1 600 espèces d’oiseaux (National Geographic). 

Au XVe siècle, à l’arrivée des conquistadors, l’Équateur fait partie de l’Empire inca. Mais le pays est vite conquis et devient une colonie espagnole pendant trois cents ans, jusqu’en 1822, quand il intègre la Grande Colombie indépendante qui comprend la Colombie, le Panama et le Venezuela (BBC, 2021). 

Statut des droits de l’enfant [1]

L’Équateur s’est engagé à respecter plusieurs instruments international aux de protection des droits de l’enfant. En 1990, le gouvernement a ratifié la Convention internationale des droits de l’enfant (CICE). Le pays est aussi membre de l’Organisation des États américains (OEA) et est lié au système interaméricain des droits de l’homme. En 1995, il a ratifié la Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction, et l’élimination de la violence contre les femmes (également connue sous le nom de Belém do Pará Convention). En 2013, en tant que membre de la Commission économique des Nations unies pour l’Amérique latine et les Caraïbes (CEPALC), l’Équateur a adopté le Consensus de Montevideo sur la population et le développement.

Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant,concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant,se rapportant à la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ont tous deux étés ratifiés en 2004. L’Équateur est également signataire d’autres instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. En 1981, le gouvernement a ratifié la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels en 1969.  

Répondre aux besoins des enfants

Droit à l’éducation

Si l’enseignement est gratuit en Équateur, bien des obstacles empêchent les enfants d’y avoir accès : les uniformes et manuels scolaires sont trop couteux, les établissements et les enseignants manquent, les infrastructures éducatives sont inadéquates et les transports publics sont peu fiables. Le manque d’écoles dans les zones rurales et autochtones oblige les enfants à parcourir de longues distances pour aller en cours, et par conséquent, les enfants vivant dans ces zones sont moins susceptibles d’aller à l’école (US Department of Labour, 2020).  

Entre 2013 et 2020, le taux de non-scolarisation, pour le premier cycle des études secondaires, était de 6 % pour les garçons et de 3 % pour les filles; et pour le deuxième cycle du secondaire, il était de 20 % pour les garçons et 18 % pour les filles. Entre 2010 et 2019, le taux d’achèvement scolaire était de 98 % (UNICEF, 2021). 

La pandémie de COVID-19 a aggravé la situation; elle a impacté 4, 6 millions d’enfants équatoriens. Avec la transition vers l’enseignement à distance en ligne, le taux d’abandon scolaire a augmenté, car de nombreux enfants n’ont pas accès à internet, aux téléphones portables, aux ordinateurs ou autres appareils électroniques. Pendant l’année scolaire 2020/2021, environ 100 000 enfants ne se sont pas inscrits à l’école à cause du manque d’accès aux appareils numériques (US Department of Labour, 2020). 

Environ 65 % des enfants vénézuéliens, migrants et réfugiés, en âge d’aller à l’école et vivant en Équateur, ne sont pas scolarisés. Bien que les documents d’identité ne soient pas requis pour s’inscrire dans les écoles, les autorités locales en exigent des enfants migrants et réfugiés (US Department of Labour, 2020).  

Droit à la santé

La malnutrition infantile chronique est un gros problème en Équateur. En 2020, parmi les enfants âgés de 0 à 4 ans, 23 % avaient un retard de croissance modéré à sévère et 10 % étaient en surpoids. En 2016, parmi les enfants en âge d’aller à l’école, soit de 5 à 19 ans, 1 % était maigre/très maigre et 28 % étaient en surpoids (UNICEF, 2021). En 2019, le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans était de 14 pour 1000 naissances vivantes : soit 4696 décès d’enfants de moins de 5 ans et 2379 décès néonatals (survenant dans les 28 premiers jours de vie). Pour les enfants âgés de 5 à 14 ans, il y a eu 1038 décès en 2019 (UNICEF, 2021). 

Droit à l’eau potable et à l’assainissement

En 2009, avant la mise en place du Plan national de l’eau, la politique du pays en matière d’eau et d’assainissement s’inscrivait dans un plan commun mis en place par l’Organisation internationale du Travail, l’OMS, l’ONU-Habitat, le PNUD, l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS) et le programme des volontaires des Nations Unies. Au niveau national, le Plan a été soutenu par le Ministerio de Desarrollo Urbano y Vivienda (ministère de l’Habitat et du Développement Urbain), la Secretaría Nacional del Agua (Comité national de l’eau) et le Ministerio de Salud Pública (ministère de la Santé Publique). Depuis la mise en place du Plan national, l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissements’est considérablement amélioré dans le pays (SDG Fund, 2017).   

En 2020, 95 % de la population avait accès à l’eau potable à domicile. En milieu urbain, ce taux est 100 % et en milieu rural, 87 %. De même, 92 % de la population avait accès aux services d’assainissement de base : 93 % en milieu urbain et 89 % en milieu rural. En 2019, 87% des écoles étaient en mesure de fournir des services d’eau potable de base et 80 % étaient en mesure de fournir des services d’assainissement de base (UNICEF, 2021). 

Droit à l’identité

Le Code équatorien de l’enfance et de l’adolescence oblige l’État à protéger le droit des enfants à l’identité (Code de l’enfance et de l’adolescence, 2003). Grâce au service d’état civil du pays, tous les enfants nés dans le pays ont le droit d’être enregistrés immédiatement après leur naissance. Ce processus doit être gratuit et accessible à tous les enfants équatoriens. 

Malgré ces obligations, tous les enfants n’ont pas accès aux services d’« enregistrement tardif des naissances » ou ne peuvent faire remplacer leurs documents d’identité perdus. L’Équateur ne dispose pas de système permettant aux enfants d’enregistrer rétroactivement leur naissance et remplacer tout document perdu engendre des frais, empêchant inévitablement les enfants d’accéder à ces documents sans assistance. 

Facteurs de risque → Les défis spécifiques du pays

Le trafic d’enfant

Les enfants équatoriens sont victimes d’exploitation sexuelle commerciale et de trafic. Les enfants réfugiés et migrants, particulièrement ceux en provenance de la Colombie, du Venezuela et du Pérou, mais aussi les enfants autochtones et afro-équatoriens sont plus exposés à la prostitution infantile et au trafic sexuel.

Les gangs criminels opérant en Équateur et qui organisent des réseaux d’exploitation sexuelle, de trafic de drogue ou s’adonnent au vol, recrutent dans le milieu scolaire et sur les réseaux sociaux (US Department of Labour, 2020). Entre 2017 et 2018, les autorités équatoriennes ont sauvé 287 victimes du trafic – la plupart faisaient l’objet de travail forcé et d’exploitation sexuelle (UNODC, 2019). 

L’exploitation sexuelle

La violence sexuelle en milieu scolaire est un problème de longue date en Équateur, mais les cas se sont multipliés depuis 2014. Ces violences ont été commises par des concierges, des chauffeurs de bus, du personnel scolaire et des enseignants sur des enfants, dont certains en situation de handicap, de la maternel le au lycée, tout aussi bien au sein des écoles publiques que privées.

Les données du gouvernement ont révélé qu’entre 2014 et 2020, 4 221 cas de violence sexuelle en milieu scolaire ont été signalés, dont des viols, des abus sexuels (en ligne) ou du harcèlement scolaire. Il a été mis au jour que ces enfants étaient forcés de se livrer à des actes sexuels non seulement à l’intérieur des établissements scolaires mais aussi en dehors de l’enceinte de l’école (Human Rights Watch, 2020). 

En 2017, des familles touchées par les violences sexuelles en milieu scolaire ont exprimé leur colère et ont ainsi forcé l’Assemblée nationale a ouvrir une enquête officielle, sous la direction de la commission Academia Aeronáutica Mayor Pedro Traversari (AAMPETRA). Ainsi la même année, sous la présidence de Moreno, le gouvernement a adopté un protocole obligeant les enseignants, les conseillers et le personnel scolaire à signaler toutes allégations de violence sexuelle dans les 24 heures et a créé une base de données pour le suivi des cas, des enquêtes et des poursuites (Human Rights Watch, 2020). 

En 2020, la Cour interaméricaine des droits de l’homme a entendu la toute première plainte pour violence sexuelle en milieu scolaire, Paola Guzmán v Ecuador. Cette affaire concernait une élève de 14 ans qui avait été violée pendant plus d’un an et qui, malgré ses plaintes n’avait pas reçu de protection. Malheureusement, cette jeune étudiante s’est suicidée.

La Cour a tenu l’Équateur responsable du droit de cette jeune fille à la vie, de son droit d’étudier sans violence sexuelle et de son droit à son autonomie corporelle. Elle a aussi reconnu le pays responsable du droit de sa famille à un procès équitable et au respect de son intégrité psychologique. Des mesures clés ont été ordonnées par la Cour pour garantir que le système éducatif équatorien s’attaque à ce fléau et empêche sa propagation (Human Rights Watch, 2020).

Violence fondée sur le genre

La violence fondée sur le genre, un problème répandu en Équateur, touche principalement les femmes et les filles issues des communautés autochtones, afro-équatoriennes et montubiennes. 68 % de femmes, soit presque 6 sur 10, ont été victimes de violence. Depuis la pandémie de COVID-19, les cas de violence fondée sur le genre ont augmenté, ce qui a conduit au développement du projet Territorial Economic Empowerment for the Indigenous, Afro-Ecuadorians, and Montubian Peoples and Nationalities (TEEIPAM) [Autonomisation économique territoriale des peuples et nationalités indigènes, afro-équatoriens et montubiens] financé par la Banque mondiale et qui devrait être opérationnel en 2022 (Orozco Buitrago, et.al, 2021). 

Des recherches menées par le TEEIPAM et le Comité Central de Mujeres (Comité central des femmes), ont révélé que les normes sociales et de genre en Équateur, poussent les hommes à croire que les femmes sont leur propriété et qu’ils ont tout pouvoir sur elles. L’Équateur reste une société patriarcale, où les rôles de genre traditionnels sont ancrés dans l’éducation des garçons et des filles dès leur plus jeune âge. Les femmes et les filles ont un accès limité au marché du travail et aux services publics tels que l’éducation ou la santé (Orozco Buitrago, et.al, 2021).

Le travail des enfants

Le pays a ratifié toutes les principales conventions internationales relatives au travail des enfants telles que la Convention sur l’âge minimum de l’Organisation internationale du travail (OIT), en 1973(n° 138); la Convention sur les pires formes de travail des enfants, en 1999 (n° 182) et le Protocole de Palerme sur la traite des personnes. Malgré ces ratifications, les enfants équatoriens sont soumis aux pires formes de travail des enfants dans les secteurs de l’agriculture, de l’industrie et des services. Les enfants âgés de5 et 14 ans représentent 82 % du secteur agricole, 3 % du secteur industriel qui comprend l’exploitation minière et la production de briques, et 15 % du secteur des services qui inclut le travail domestique, la mendicité, la vente, le cirage de chaussures, le travail dans la rue et la vente de journaux (US Department of Labour, 2020).  

Selon des rapports du gouvernement, des enfants péruviens sont recrutés sous de fausses promesses d’embauche dans des mines illégales en Équateur. Des enfants âgés de 6 à 10 ans, issus des communautés autochtones, sont également victimes de ces fausses promesses d’embauche et sont souvent emmenés à Guayaquil et Quito.

Les enfants réfugiés et migrants colombiens et vénézuéliens sont particulièrement exposés au travail d’exploitation tel que le travail de rue et la mendicité forcée, mais on les trouve aussi dans le secteur de la pêche dans la région côtière du pays et dans l’exploitation minière artisanale dans les régions du nord et du sud de l’Équateur (US Department of Labour, 2020).  

La grossesse chez les adolescentes

L’Équateur a le troisième taux le plus élevé de grossesse chez les adolescentes en Amérique du Sud. Entre 2015 et 2020, le taux de natalité était de 64 % pour les filles âgées de 15 à 19 ans (UNICEF, 2021). Les statistiques publiées par l’Office national de statistiques et de recensement (INEC) du pays ont révélé que sur 100 naissances vivantes 49,3 étaient de mères adolescentes. Au cours de la dernière décennie, les naissances chez les filles âgées de 10 à 14 ans ont augmenté de 78 % et de 11 % chez les filles âgées de 15 à 19 ans (Mosquera Benalcazar, 2019). 

Dans les hautes terres du Chimburazo, Cotopaxi et de l’Imbabura, la pauvreté, le faible taux de scolarisation, les inégalités entre les sexes et les normes culturelles expliquent un taux élevé de grossesse chez les adolescentes. Les adolescentes vivant dans les hautes terres ont moins de chance d’accéder aux services de santé sexuelle et reproductive et bien que les filles connaissent des méthodes de contraception, peu les utilisent. Les abus sexuels et les violences sexuelles sont responsables de la hausse des taux de grossesse adolescente. Une enquête nationale menée par l’INEC estime que 61 % des femmes ont subi une forme de violence physique, psychologique ou sexuelle (Mosquera Benalcazar, 2019).

Écrit par Vanessa Cezarita Cordeiro

Relu en interne par Aditi Partha

Traduit par Karen Castillo

Relu par Jean-Christophe Brunet

Mis à jour le 17 April 2022 

Références : 

BBC. (2021, May 26). “Ecuador country profile.” Retrieved from BBC Monitoring, accessed 11 April 2022. 

Consortium for Street Children. (2019, April). “Can a child obtain retroactive or replacement birth registration documents?”. Retrieved from Consortium for Street Children, accessed 12 April 2022. 

Human Rights Watch. (2020, December 9). “Ecuador: High levels of sexual violence in schools.” Retrieved from Human Rights Watch, accessed 11 April 2022. 

Human Rights Watch. (2020, December 9). “It’s a constant fight. School-related sexual violence and young survivors’ struggle for justice in Ecuador.” Retrieved from Human Rights Watch, accessed 12 April 2022. 

Mosquera Benalcazar, J. (2019, March 27). “Let them be girls, and not mothers before time.” Retrieved from IS Global, accessed 12 April 2022. 

National Geographic Kids. (n.d). “Ecuador.” Retrieved from National Geographic Kids, accessed 11 April 2022. 

Orozco Buitrago, D.C., Contreras-Urbina, M., Levano, L., Felicio, M., & Salazar, C. (2021, December 9). “Working to reduce gender-based violence in indigenous communities in Ecuador.” Retrieved from World Bank blogs, accessed 12 April 2022. 

SDG Fund. (2017). “Case study water governance in Ecuador.” Retrieved from Sustainable Development Goals Funds, accessed 12 April 2022.

UNICEF. (2021, October). “The state of the world’s children 2021.” Retrieved from UNICEF, accessed 12 April 2022. 

UNODC. (2019, April 17). “Ecuador and UNODC say #AQUIESTOY against human trafficking.” Retrieved from United Nations Office of Drugs and Crime, accessed 12 April 2022. 

US Department of Labour. (2020). “2020 findings on the worst forms of child labour: Ecuador.” Retrieved from US Department of Labour Bureau of International Labour Affairs, accessed 12 April 2022. 

US Department of State. (2021). “2021 trafficking in persons report: Ecuador.” Retrieved from US Department of State Office to Monitor and Combat Trafficking in Persons, accessed 12 April 2022.

Vélez, H.P. (2021, November 15). “Ecuador.” Retrieved from Britannica, accessed 11 April 2022.


[1] Cet article ne vise en aucun cas à donner un compte rendu complet ou représentatif des droits de l’enfant en Équateur; en effet, l’un des nombreux défis est le peu d’informations actualisées sur les enfants équatoriens, dont la plupart sont peu fiables, non représentatives, obsolètes ou tout simplement inexistantes.