Enfants de Kiribati

Enfants de Kiribati

Concrétiser les droits de l’enfant à Kiribati

   Un garçon de Kiribati ©Luigi Guarino

Les enfants du Kiribati ont culturellement une place centrale dans la société mais ils restent vulnérables et aux prises à des violations manifestes de leurs droits, notamment avec le développement de la prostitution.

Carte du Respect des Droits de l'Enfant dans le monde  kiribati_sm00

Indice de Concrétisation des Droits de l’Enfant :  7.8 / 10
Niveau orange : Problèmes sensibles

Population : 105,7 mille
Pop. de 0-14 ans : 33,9 %

Espérance de vie : 68,9 ans
Mortalité des – de 5 ans : 44 ‰

Principaux problèmes rencontrés par les enfants à Kiribati:

Droit à l’identité

Au Kiribati, le droit à l’identité de l’article 7 de la CIDE est garanti par une procédure d’enregistrement auprès du Bureau civil d’enregistrement.

La loi prévoit que le père et/ou la mère doivent enregistrer la naissance de l’enfant dans les 10 jours. Si les parents sont dans l’impossibilité de se rendre au Bureau civil d’enregistrement, toute personne ayant la charge de l’enfant, le médecin ou une personne du personnel médical ayant assisté à la naissance peuvent le faire.

Aussi, toute personne devant enregistrer une naissance et qui ne remplit pas son obligation peut-elle être condamnée à une amende de 10 dollars. De même, toute personne fournissant de fausses informations peut être condamnée à une amende de 600 dollars et/ou une peine d’emprisonnement de 3 ans.

Les frais d’enregistrement des naissances sont gratuits les 12 premiers mois de la naissance. Après 12 mois, les frais sont de 10 dollars (4 dollars pour les frais d’enregistrement, 1 dollar pour la recherche en vérification de la non inscription antérieure, 2 dollars de frais de justice, 3 dollars pour le certificat de naissance). L’enregistrement sur le registre d’état civil doit également être fait lorsqu’une adoption est devenue officielle.

Il y a lieu de remarquer que cette législation n’est pas toujours appliquée. En conséquence, beaucoup d’enfants sont invisibles aux yeux de la société, ce qui les rend plus vulnérables aux discriminations, à la négligence, à l’exploitation et aux abus, notamment sexuels.

Santé

En 2009, le taux de mortalité infantile des enfants de moins de 5 ans était de 46%, classant ainsi le pays à la 61ème place dans le classement décroissant des pays en termes de développement.

De même, les statistiques de l’UNICEF montrent que le pourcentage de nouveau-nés présentant une insuffisance pondérale à la naissance a été multiplié par 5 entre 2005 et 2009. Les populations rurales sont plus touchées que les populations urbaines.

Ainsi, selon l’indice de développement humain, le Kiribati est au 129ème rang mondial.

En mars 2012, l’UNDP estimait que le Kiribati pouvait potentiellement réduire le taux de mortalité infantile, et améliorer la santé de la mère, atteignant ainsi les MGD.

Les enfants du Kiribati sont également touchés par des problèmes de santé (maladies respiratoires, diarrhées, anémie, obésité) liée à la malnutrition et à une alimentation trop riche en sucre.

Les maladies sexuellement transmissibles telles que le Sida se répandent.

L’accès à l’eau potable et à des sanitaires adaptés pose également de gros problèmes de santé pour les enfants puisque des études de l’UNICEF ont révélé que l’eau contenait de forte concentration en nitrates dans certains endroits, ce qui provoquerait des maladies notamment des problèmes cérébraux chez les enfants.

Education

L’école est gratuite et obligatoire pour tous de 6 à 14 ans.

En 1999, 99,5% des enfants du Kiribati allaient à l’école primaire. La répartition garçon/fille était quasiment égale dans le primaire, mais les filles sont plus nombreuses que les garçons au collège et dans le secondaire.

Malgré la politique du gouvernement, qui consacre quasiment 1/5 de son budget à l’éducation, des problèmes demeurent dans la qualité de l’enseignement, l’accessibilité aux infrastructures scolaires pour les enfants des zones éloignées des centres urbains, les coûts de l’enseignement, ainsi que le manque de qualification des enseignants.

La différence de niveau entre les zones reculées du Kiribati et les écoles de Tarawa Sud poussent les familles à y envoyer leurs enfants pour leurs études secondaires. Les écoles de Tarawa sud sont donc souvent surpeuplées – une école accueillant jusqu’à 1 000 élèves.

De plus, l’école devient un environnement où la sécurité n’est pas toujours assurée pour les enfants éloignés de leurs parents. Ils sont victimes d’intimidations et de harcèlements, y compris sexuels, et d’exploitation commerciale, ce qui les contraint- à abandonner l’école.

Environnement

Composée de 33 atolls, le Kiribati est directement concerné par le réchauffement climatique.

La montée des eaux constitue une menace directe et réelle qui a des répercussions énormes sur l’habitat et l’alimentation des enfants du Kiribati. Des enfants voient déjà leur maison se détériorer ou sont contraints d’abandonner leur maison pour éviter la montée des eaux. Lors de la dernière conférence de Doha, le Président du Kiribati, Anote TONG, a déclaré que « (…) des communautés(…) ont dû être déplacées car leurs villages étaient submergés ». Il constate qu’il y a de plus en plus de grandes marées et annonce qu’au «Kiribati, nous ne parlons pas de croissance économique ou de niveau de vie. Nous parlons de notre survie » (…) avant d’ajouter que « le temps [leur] est compté ».

Le Kiribati est en pourparlers avec le gouvernement des iles Fidji afin d’acheter des hectares de terre pour y transporter une partie de la population Kiribatienne.

L’Etat consacre une grande partie de ses ressources à lutter contre ce phénomène au détriment des politiques de santé, des politiques alimentaires et éducatives.

Parallèlement, la République du Kiribati a créé la plus grande réserve marine naturelle du monde, la PIPA (Phoenix IslandsProtected Area – de la taille de la Californie à peu près) pour protéger sa faune et sa flore marines. Cette réserve est inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2010.

Travail des enfants

Au Kiribati, les enfants de moins de 14 ans n’ont pas le droit de travailler (partie IX, Section 84 de l’Ordonnance Emploi, Emploi des enfants et autres jeunes personnes) et les enfants de moins de 16 ans n’ont pas le droit de travailler dans le secteur industriel ou à bord des bateaux. La Constitution interdit également le travail forcé.

Mais avec 98 000 habitants, dont près de 50% sont des enfants, et un revenu national brut par habitant de 1890 dollars, les enfants sont souvent obligés de travailler pour subvenir aux besoins de leurs familles.

Ainsi, nombreux sont les enfants de moins de 14 ans qui travaillent dans les secteurs traditionnels et informels de l’économie, soit à plein temps, soit en-dehors des heures de cours. Ils vendent par exemple des balais, des peignes, des guirlandes et d’autres petites marchandises dans la rue.

Trafic d’enfants

Bien que les enfants au Kiribati ne semblent pas être visés par le trafic des enfants, la loi ne les protège pas puisque le trafic d’enfants n’est pas interdit.

Violences envers les enfants

Les violences domestiques sur les enfants sont fréquentes et acceptées par la communauté. Le recours à la violence contre les enfants est exacerbé par l’alcool, en plus des pressions économiques subies par les familles.

Les violences domestiques sont d’autant plus inquiétantes pour les enfants que la loi du silence dans les communautés les rend peu contrôlables. Elles sont très rarement dénoncées.

En plus, les rapports de police font état de jeunes gens de plus en plus alcoolisés qui s’en prennent physiquement aux membres de leurs familles, en particulier les femmes.

Bien que communément rejeté, le viol des enfants est une forme traditionnelle de punition. La plupart du temps, les enfants sont violés par un membre de leur famille ou une personne connue de la victime. Les filles sont les principales victimes. Cela a des conséquences désastreuses dans leur vie puisque dès lors qu’elles perdent leur virginité, elles sont considérées par la communauté comme « endommagées de façon permanente ». Leurs visages peuvent également porter des stigmates pour montrer à la communauté qu’elles ne sont plus vierges.

Prostitution et exploitation sexuelle

La code pénal puni de 2 ans d’emprisonnement le recours à des enfants de moins de 15 ans dans le but d’avoir des rapports sexuels, et interdits aux parents et gardiens égaux de prostituer les enfants de moins de 15 ans.

Or, un grand nombre de filles sont victimes d’exploitation sexuelles par des membres de leurs familles, de leur communauté.

En 2000, 80 jeunes « te korekorea » (travailleuses du sexe associées aux navires étrangers de pêche s’amarrant dans Kiribati) sont allées visiter des bateaux dans le port souvent en échange d’argent, d’habits et de poissons. Ces travailleuses du sexe peuvent avoir 14 ans. Elles s’exposent à des maladies sexuellement transmissibles en ayant des rapports sexuels non protégés.

La prostitution est favorisée par le statut peu protégé des femmes et des enfants, le manque d’éducation, le taux de chômage, une législation peu protectrice et la pauvreté.

Ces jeunes filles du sexe font partie d’un circuit qui permet de nourrir des familles entières, qui, parfois, incitent les jeunes filles à se prostituer.

Discriminations

Au Kiribati, les filles restent moins scolarisées que les garçons même si les choses évoluent significativement, notamment depuis la signature de la Résolution de l’Assemblée Générale des Nations Unies sur les filles en 2006. Le fossé entre les filles et les garçons n’existent quasiment plus au primaire et au secondaire.

Par ailleurs, les filles sont de plus en plus nombreuses dans le tertiaire et les formations en alternance.

Toutefois, une discrimination demeure contre les filles et adolescentes victimes de viols ou d’incestes, qui, du fait qu’elles aient perdu leur virginité, ne sont plus acceptées dans la plupart des écoles. Elles se retrouvent donc exclues du système scolaire, et encore plus stigmatisées par la société.

En outre, les enfants issus de familles pauvres continuent d’être victimes de discrimination du fait du coût de scolarisation, du manque d’infrastructures dans les zones reculées et des disparités d’enseignement dans les écoles maternelles.

Enfants handicapés

23% des personnes handicapées sur les 3 840 personnes recensées ont moins de 20 ans (sondage 2003-2005).
Les enfants handicapés sont culturellement bien acceptés, et les familles se font un devoir de fournir un environnement aimant et protecteur à tous ces enfants.

La discrimination contre les enfants handicapés, mentalement ou physiquement, est également interdite par la Constitution.

Toutefois, les enfants handicapés souffrent de discrimination du fait des faibles ressources qui leur sont allouées.
Une seule école à Tarawa Sud fondée par la Croix Rouge leur est dédiée. Cette école accueille des enfants de tout âge et avec des handicapes très divers, encadrés par des enseignants qui n’ont reçu aucune formation particulière.

De plus, le critère d’admission pour les enfants handicapés en fauteuil roulant est celui du poids et de la mobilité: si l’enfant handicapé est trop lourd pour être soulevé et monté dans le bus, alors l’enfant ne peut plus aller à l’école puisque les bus scolaires ne sont pas équipés de mécanisme de montée automatique.

Le fait que la plupart des enfants handicapés n’aient pas l’opportunité d’aller à l’école est en contradiction avec leur droit.

Malgré le manque de ressources et de moyens, le gouvernement s’est engagé dans des politiques publiques en faveur des handicapés afin de mieux respecter l’article 23 de la convention des droits de l’enfant.

Pornographie d’enfant

La pornographie d’enfant n’est pas encore un délit. Ainsi, la pornographie infantile est largement accessible en vidéos et sur internet.

Mariage

L’âge légal pour se marier est de 16 ans.

Toutefois, pour des raisons culturelles, les parents, des membres de la famille, ou des chefs de villages au nom des familles arrangent des mariages pour des enfants de moins de 13 ans.

Le mariage est aussi un moyen détourné de vendre les enfants, et ainsi subvenir aux besoins de la famille.

Adoption

L’enfant n’est pas complètement protégé par les lois sur l’adoption, et reste l’objet d’adoptions informelles fondées sur la tradition Kiribatienne de partager les enfants entre les familles.
L’adoption légale peut être annulée s’il est démontré que l’enfant n’est pas assez dévoué ou attentionné envers ses parents adoptifs ou ses grands-parents. Tout est laissé à la discrétion du magistrat.

Les châtiments corporels

81% des enfants âgés entre 2-14 ans ont subi des mesures de discipline violentes entre 2005 et 2006.
Dans la culture du Kiribati, les enfants doivent respect et obéissance à leurs ainés dès leur plus jeune âge.

Ainsi, si le code pénal interdit la cruauté sur les enfants, il autorise les « punitions raisonnables » (article 226).

Les châtiments corporels sont légaux à la maison, dans les structures d’accueil et de soins.
Ils sont considérés illégaux à l’école depuis 1997 (Amendement à l’Ordonnance Education) mais ils ne sont pas interdits par le code pénal.

Les châtiments corporels peuvent aussi être infligés comme une sanction. Néanmoins, en pratique, ils sont rarement prescrits par les magistrats.
Ce sont également des mesures disciplinaires légales dans les institutions pénales.

Justice des mineurs

Le droit pénal kiribatien ne prévoit aucun aménagement particulier pour les enfants. Ainsi, les adolescents de 16 – 18 ans sont détenus avec les adultes.

Il n’y a aucune alternative à la prison pour un jeune délinquant, ce qui est notamment contraire à l’art. 40 de la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE).