Enfant du Libéria

Concrétiser les droits de l’enfant au Libéria

Le Libéria a encore un long chemin à parcourir pour assurer la reconnaissance et la mise en oeuvre efficace des droits de l’enfant. Les pratiques culturelles et traditionnelles, encore très prévalantes dans la société libérienne, et la très jeune population du pays (41 % en dessous de 15 ans et un âge médian de 19,1) représentent un réel défi pour les enfants et le droit des enfants au Libéria.

Les enfants manquent d’accès à une éducation de qualité, aux installations sanitaires et aux services de santé. Ils sont victimes de pratiques néfastes telles que le mariage d’enfants, le travail forcé ou la maltraitance. Ils peuvent aussi être accusés de sorcellerie et être soumis à des meurtres rituels et des cérémonies d’initiation forcée comme la mutilation génitale féminine.

Indice de des Droits de l’Enfant4,73 / 10
Niveau noir: Situation très grave

Population : 5,05 millions
Pop. de 0 à 14 ans : 40,7 %

Espérance de vie : 63,7 ans
Mortalité des moins de 5 ans : 84.6 ‰

Coup d’œil sur le Libéria

La République du Libéria est un pays sub-saharien d’Afrique de l’Ouest dont le littoral est bordé par l’océan Atlantique. Sa capitale est Monrovia. Le pays partage ses frontières avec  la Guinée au Nord, la Côte d’Ivoire à l’Est et le Sierra Leone à l’Ouest. La langue officielle du pays est l’anglais. Toutefois, plus de 30 autres langues indigènes sont parlées dans le pays.

Les guerres civiles au Libéria (1989-1996 et 1999-2003) représentent l’un des conflits les  plus violents d’Afrique depuis son indépendance. Ces guerres civiles ont été marquées par des violations généralisées et systématiques des droits de l’homme et du droit humanitaire international. Beaucoup d’enfants ont été enrôlés en tant qu’enfants-soldats et ont été soumis à des violences sexuelles et à la torture. En plus de ces violations, la guerre a déstabilisé l’économie du pays, laissant l’État sans ressources et les Libériens restants dans la précarité.

L’accord de paix d’Accra de 2003 et la destitution du président Charles Taylor ont mis fin à une guerre civile qui a provoqué le déplacement d’environ 1 million de Libériens et causé la mort de 250 000 personnes, notamment des enfants. En 2005, après deux ans de gouvernement de transition, Ellen Johnson Sirleaf a été élue présidente. C’est la première femme en Afrique a avoir été élue chef d’État.

Dans cette période d’après-guerre, la présidente Sirleaf a rétabli une économie de marché dépendante des ressources naturelles, de l’aide extérieure et des investissements directs étrangers. En 2013 et pendant 3 ans, l’épidémie du virus Ebola a frappé le Libéria tuant environ 5 000 Libériens provoquant une nouvelle récession. En 2018, George Weah a succédé à la présidente Sirleaf en tant que président du Libéria.

Statut des droits des enfants [1]

Depuis 1993, le Libéria est un état membre de la Convention relative aux droits de l’enfant et depuis 2007 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant. En 2004, le pays a signé le Protocole facultatif concernant l’implication des enfants dans les conflits armés et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, mais ne parvient toujours pas à les ratifier. (Comité des Droits de l’Enfant, 2012, para 84). Cependant, malgré les recommandations du Comité des Droits de l’Enfant, le Libéria n’a pas signé le Protocole facultatif à la convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications et ne fournit pas de procédure de plainte individuelle au regard du CDE.

Deux mesures importantes en matière de protection des droits de l’enfant ont été mises en place avec la loi de réforme de l’éducation du 8 août 2011 et la loi libérienne sur les enfants du 4 février 2012, intégrant ainsi la CDE dans le système juridique national. Malgré ces initiatives, les lois du pays n’offrent pas de protection concernant l’âge minimum du mariage, l’adoption et la justice pour mineurs.

De nombreuses avancées dans le domaine de la protection de l’enfant ont vu le jour, telles que la Convention anti-corruption (2008), la loi sur le viol (2006) et la loi contre le trafic (2005). Le pays a même mis en place la Commission Nationale Indépendante des Droits de l’Homme en 2005, mais malgré tous ces efforts, l’application de ces lois est difficile à cause des faiblesses institutionnelles, de la corruption, du manque de vigilance du gouvernement et des contraintes financières et logistiques (HCDH, 2016).

Répondre aux besoins des enfants

Droit à l’éducation

Les programmes d’éducation de la petite enfance (EPE) doivent être accessibles à tous les enfants et l’école est gratuite et obligatoire jusqu’à la troisième (Loi sur la Réforme de l’Education 2011). Toutefois, beaucoup d’enfants n’ont toujours pas accès à une éducation de base à cause des frais d’inscription, des examens d’entrée non-officiels, de la pauvreté et du statut rural. (UNESCO, 2020)

De ce fait, le taux d’alphabétisation des jeunes au Libéria avoisine les 55% et le taux d’inscription à l’école reste particulièrement bas (École Primaire: 45,5%; Collège: 21,1%; Lycée: 26,3%; Université: 6,8%). (Primson MS, 2018). En 2018, le gouvernement du pays a pris une première mesure en instaurant la gratuité des frais de scolarité aux élèves de premier cycle. (Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies, 2020.) L’accès à une éducation de qualité est affecté par la surscolarisation sous-jacente (Ministère de l’Éducation, 2016) qui entraîne plus de décrochage scolaire (UNICEF, 2012) et favorise l’influence du statut social. (Primson MS, 2018)

Aux autres problèmes affectant l’accès à une éducation de qualité, s’ajoute l’absence de gestion des enseignants et la mauvaise qualité du système éducatif national. D’un côté, le budget alloué à l’éducation est bien trop restreint. Le Plan d’Action Éducation 2030 recommande d’octroyer au moins 5% du PIB à l’éducation. En 2017, le gouvernement du Libéria ne consacrait que 3,83% du PIB aux dépenses pour l’éducation.

D’autre part, l’argent investi sert à payer des enseignants « fantômes » ou non qualifiés (un tiers du personnel éducatif n’a pas les qualifications nécessaires ou ment sur ses qualifications). Mais, plus grave encore, les châtiments corporels lors d’une punition sont toujours considérés légaux en vertu du Code Pénal libérien et de la Loi Protection de l’Enfance de 2011 (Article 5 [8] du Code Pénal de 1976 ; Article 7 [7] Loi Protection de l’Enfance 2011) (UNESCO, 2020).

Droit à la santé

Le Libéria est considéré comme l’un des pays les plus humides au monde. Pourtant, environ 90% de sa population n’a pas accès à l’eau potable et aux services d’hygiène. Les enfants n’ont pas accès aux éléments de base de la vie et cela entraine des taux élevés de maladies diarrhéiques, de malnutrition infantile et de maladies infectieuses (UNICEF, n.d.). Dans le pays, le manque d’installations EAH (eau, assainissement, hygiène) entraîne un taux élevé de décrochage scolaire chez les enfants, et plus particulièrement chez les filles.

Les enfants et les adolescents n’ont pas toujours accès aux services de santé sexuelle et reproductive. Ils ne sont pas sensibilisés et n’ont pas accès aux mesures et moyens de contraception, ce qui entraine un taux élevé de grossesses précoces chez les adolescentes. En raison du manque de services de santé, la prévention de la transmission du VIH de mère à enfant reste un véritable défi (Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies, 2020). Environ 1% de la population est porteur du VIH/SIDA, dont 4 000 enfants de moins de 14 ans.

En raison du manque d’accès à l’avortement et de l’interdiction générale de celui-ci, la pratique d’avortements clandestins non sécurisés entraîne souvent la mort de la mère. Les nouveau-nés ne reçoivent donc pas les soins maternels indispensables. Chaque année, 13 500 enfants de moins de 5 ans meurent de maladies curables, et notamment d’affections néonatales, de malaria, de pneumonie, de maladies diarrhéiques et de la rougeole (UNICEF, 2019).

Un autre fait alarmant est la grave pénurie de professionnels de la santé au Libéria.  Avec 12 agents de santé pour 10 000 habitants, le Libéria ne dispose que de la moitié des 23 agents recommandés par l’OMS pour délivrer les soins essentiels de santé maternelle et infantile à toute la population (Front Public Health, 2019). A cause de cette pénurie, l’accès aux soins de santé pour les enfants de familles défavorisées est très compliqué.

Droit à l’identité

Le Libéria a l’un des plus faibles taux d’enregistrement des naissances de toute l’Afrique de l’Ouest. Seuls 25% des enfants de moins de 5 ans sont enregistrés à la naissance (UNICEF Libéria, 2020). L’enregistrement des naissances est fondamental pour fournir aux enfants une identité légale ainsi que l’accès aux services suivants : éducation, soins médicaux et autres services de base.

Un système a été mis en place pour augmenter l’enregistrement des naissances dans les établissements de santé publique et dans les centres de service du pays. Ce système propose la délivrance gratuite d’un certificat de naissance différé; pour les enfants de 0 à 5 ans dans les établissements de santé; et pour les enfants de 0 à 12 ans au Bureau of Vital Statistics pour l’enregistrement des naissances et le certificat de décès. Malgré ces avancées, le taux d’enregistrement des naissances demeure faible au Libéria, surtout dans les zones rurales.

Avec l’aide du gouvernement français, le nombre de centres d’enregistrement des naissances dans le pays est passé de 15 en 2018 à 32 à la mi-2020. Ce système de centres d’enregistrement des naissances couvre jusqu’à 98% du territoire libérien. (UNICEF Liberia, 2020)  Plus de 5 000 enfants de moins de 5 ans vont être enregistrés et obtenir leur certificat de naissance grâce à l’aide du gouvernement français.

L’autre problème dominant concerne le droit à la nationalité et plus particulièrement la Loi sur les Etrangers et la Nationalité de 1973, qui définit la citoyenneté selon deux principes: le jus soli (le droit du sol) et le jus sanguinis (le droit du sang). Par conséquent, le chapitre 20 de la Loi sur les Etrangers et la Nationalité et l’article 27 de la constitution libérienne limitent la citoyenneté par la naissance à un enfant de race libérienne indigène ou descendant d’une race libérienne indigène (§ 20,1 a. de la Loi sur les Etrangers et la Nationalité de 1973).

Cette législation empêche aux femmes de transmettre la nationalité libérienne à leurs enfants s’ils sont nés d’une femme libérienne mariée à un non-libérien rencontré en dehors du pays (§ 20,1 b) Loi sur les Etrangers et la Nationalité de 1973). Elle viole les droits de la femme (Article 9 [2] CEDAW), les droits de l’enfant (Article 7 CRC) et les droits civils et politiques (Article 24 [1] PIDCP), mais aussi la Constitution du Liberia (article 28 de la Constitution de la République du Liberia).

Facteurs risques — Problèmes spécifiques au pays

Pauvreté

Environ 64% de la population vit sous le seuil de pauvreté et l’économie sous-développée du pays met en danger la vie de beaucoup de Libériens. Le manque de moyens financiers est à l’origine de nombreux dysfonctionnements au Libéria, comme le manque d’accès à des services de santé de qualité et aux sanitaires. De plus, beaucoup d’enfants n’ont pas accès à une éducation de qualité car ils sont contraints de travailler (Fonds Monétaire International, 2021).

La pauvreté chez les enfants crée des problèmes à un moment crucial de leur développement physique, social et mental. Le manque de nourriture, de soins médicaux, d’éducation, de sécurité et la violence domestique peuvent avoir des conséquences dramatiques chez les enfants. Cette situation perpétue le transfert intergénérationnel de la pauvreté et de la délinquance, et peut entraîner différentes formes de dépendances (Fonds Monétaire International, 2011)

Discrimination

Malgré l’intégration du principe de non-discrimination à la Constitution du Libéria, les enfants du Libéria sont toujours confrontés aux problèmes de discrimination. Les enfants handicapés sont souvent stigmatisés, abandonnés, délaissés, et exposés à des risques, notamment la mort, et/ou à des traitements inhumains et dégradants. (Département d’Etat des Etats Unis, 2018).

Au Libéria, la discrimination à l’encontre des enfants atteints du VIH/SIDA, atteints de troubles psychosociaux, des survivants de la maladie à virus Ebola, et des enfants atteints d’albinisme persiste. (Comité des Droits de l’Homme, 2018) La Loi sur les Etrangers et la Nationalité et la Constitution n’ont pas de réglementation concernant la discrimination à l’égard des femmes. Pire encore, ils contiennent des lois discriminatoires basées sur le sexe et l’origine ethnique en ce qui concerne la jouissance du droit à la nationalité et à la naturalisation (Conseil des Droits de l’Homme, 2020).

Au Libéria, les relations sexuelles entre adultes consentants du même sexe sont encore criminalisées et punies par de lourdes peines. Le mariage homosexuel est lui aussi interdit. Les personnes LGBTI, y compris les enfants, subissent une discrimination sociale et législative et sont donc très stigmatisées. Elles n’ont pas accès aux mêmes droits que les autres citoyens, et la violence infligée par des acteurs étatiques ou non étatiques en raison de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre, est exacerbée par l’absence d’enquêtes efficaces (Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, 2020). Toutes ces formes de discrimination découlent du manque d’accès à l’éducation et de l’exclusion de ces enfants de la société, et contribuent à la transmission de la pauvreté de génération en génération.

Travail des enfants

Le travail des enfants les prive d’éducation et les expose à de graves risques sanitaires. Ce manque d’éducation perpétue ainsi le cycle intergénérationnel de la pauvreté (Avocats sans frontières, 2018). Selon une étude, 15% des enfants libériens ont été confrontés au travail forcé. (UNCIEF, 2019) Les enfants sont contraints de travailler comme vendeurs de rue, mendiants ou domestiques, et aux pires formes de travail forcé comme la fabrication du caoutchouc et l’exploitation minière. Malgré une recommandation du Comité des Droits de l’Homme en 2018 et des efforts pour lutter contre ces formes de travail des enfants dans le code pénal et la loi libérienne sur les enfants, le gouvernement ne parvient pas à mettre en place un plan d’action national et à faire appliquer les dispositions relatives au travail forcé figurant dans le Code pénal et la Loi Protection de l’Enfance.

Exploitation sexuelle des enfants

Le viol est le deuxième crime grave le plus souvent signalé au Libéria et est un héritage de la guerre civile qui dure depuis 14 ans. (HCDH, 2016) Pendant la guerre, entre 61,4 et 77,4% de femmes et de fillettes ont été violées au Libéria. (HCDC, 2016) La plupart des agresseurs sont connus des victimes et sont des membres de leur village, des parents ou des voisins. Environ 80% des victimes de viols sont âgées de moins de 18 ans, y compris des fillettes de moins de 5 ans. (HCDC, 2020) Malgré l’application de la Loi sur le viol de 2005 qui modifie le Code pénal de 1976, le Tribunal Spécial, le Tribunal E, les poursuites et les condamnations pour viol restent faibles (environ 2%).

Les obstacles à la mise en œuvre de la justice sont les faiblesses institutionnelles, la corruption, le manque de diligence du gouvernement, les contraintes logistiques et financières, l’influence des acteurs traditionnels, les pratiques culturelles et patriarcales ainsi que les stéréotypes de genre.

Mariage d’enfants

Le Libéria fait partie des 20 pays où le taux de mariages d’enfants est le plus élevé au monde. L’influence de l’inégalité des sexes sur le mariage forcé et le mariage d’enfants le démontre. En effet, pour 36% de filles mariées avant l’âge de 18 ans (9% avant l’âge de 15 ans), seulement 5% des garçons sont mariés au même âge. (UNICEF, 2019) Au Libéria les raisons principales amenant au mariage d’enfants sont la pauvreté, le niveau d’éducation, les pratiques traditionnelles néfastes et le niveau élevé d’inégalité entre les sexes (Girls not brides, 2020).

La législation nationale, Loi sur les Relations Familiales 1973, fixe l’âge légal du mariage à 18 ans pour les filles et à 21 ans pour les garçons. En 2012, la Loi Protection de l’Enfance libérienne a supprimé les exceptions permettant un mariage au-delà de l’âge de 16 ans (avant 18 ans). Cette suppression est affaiblie par l’absence d’abrogation de la section 2.2 de la Loi sur les Relations Familiales libérienne qui permet un tel arrangement. Malgré les efforts pour abolir le mariage d’enfants, le manque de cohérence des lois statutaires et coutumières, les campagnes de sensibilisation massives et l’engagement auprès des chefs locaux et traditionnels ont entraîné la généralisation de la pratique continue du mariage précoce forcé. (UNICEF, 2019)

Mutilations génitales féminines (MGF)

La mutilation génitale féminine (MGF), aussi connue sous le nom de circoncision féminine, est une pratique qui consiste à retirer une partie ou l’intégralité des organes génitaux externes de la fille ou de la femme, ou à les mutiler d’une quelconque autre façon, pour des raisons culturelles ou autres que thérapeutiques. (OMS, UNICEF, et FNUAP, 1997) Des sociétés tribales secrètes, comme les Sande, « écoles de brousse », et leurs chefs traditionnels et communautaires continuent de perpétrer cette pratique culturelle barbare généralement dans le cadre de rites d’initiation. Au Libéria, 40% des femmes âgées de 16 à 45 ans ont subi une MGF. (Ministère de la Santé et de la Protection Sociale, 2020)

Malgré l’interdiction par décret présidentiel en 2018 de cette pratique culturelle et de cette tradition pour les filles de moins de 18 ans ou pour les femmes non consentantes, le gouvernement libérien n’a pas encore mis en œuvre de législation interdisant les MGF.(Conseil des Droits de l’Homme, 2020) Un projet de loi autonome contre les MGF a été rédigé et soumis pour examen, mais il n’a toujours pas été intégré dans le système juridique national. (Conseil des Droits de l’Homme, 2020) Bien au contraire, les dispositions sanctionnant les MGF ont été supprimées de la Loi sur la Violence Domestique, mettant les filles et les femmes en grand danger.

Rites d’initiation forcés

La plupart des rites d’initiation forcés sont fondés sur des principes patriarcaux et des stéréotypes profondément ancrés dans la société et dans la famille. Les sociétés tribales les considèrent notamment comme un rite de passage à l’âge adulte. 

Un rituel d’initiation similaire existe pour les garçons et les adolescents de sexe masculin. La plupart du temps, ces rites commencent par l’enlèvement du garçon ou de l’adolescent. Les initiations sont organisées pour initier les personnes ne faisant pas partie de la tribu, à ses valeurs culturelles traditionnelles ainsi qu’aux contraintes et obligations de l’âge adulte. Ces sociétés secrètes, comme la société Poro, initient souvent de force des individus non membres qui ne respectent pas les règles de la société, qui violent un terrain sacré ou qui perturbent les activités de la société. (HCDH, 2015) Ces pratiques doivent être gardées secrètes et les violations de ce code de société entraînent souvent de graves punitions telles que des meurtres. (HCDH, 2015)

Malgré la condamnation de l’enlèvement et de l’initiation forcée en tant qu’infraction pénale, en vertu de la loi libérienne, et la violation de nombreux droits de l’homme, ces cérémonies d’initiation sont toujours très répandues et le gouvernement ne peut ou ne veut pas s’attaquer à ce problème de manière efficace. (HCDC, 2015) Les violations des droits de l’homme susmentionnées comprennent le droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion, le droit à la liberté de circulation, le droit de ne pas être détenu arbitrairement, le droit de à la non-discrimination en raison de la religion ou de l’appartenance ethnique, ainsi que le droit à la protection contre la torture, les initiations infligeant de grandes souffrances et douleurs.

Sorcellerie

Les enfants accusés de sorcellerie sont contraints d’avouer leurs fautes ou d’être examinés par un sorcier utilisant des méthodes qui, en soi, constituent de mauvais traitements, par exemple, leur enfoncer un hameçon dans la gorge ou leur poser une machette brûlante sur la peau. Les enfants qui avouent ou qui sont soupçonnés d’avoir utilisé la sorcellerie, sont soumis à des rituels de « purification » et sont punis. En guise de punition, ils peuvent être privés d’éducation, rasés en public et séparés de leurs familles afin de vivre auprès d’un sorcier ou d’un prophète. Les enfants accusés de sorcellerie sont souvent victimes d’abus et de violences sexuelles et psychologiques, vivant souvent dans la rue et arborant des traumatismes physiques et psychologiques. (HCDH, 2015)

Justice des enfants

En septembre 2011, la division de la justice pour enfants du Ministère de la Justice du Libéria a fait un pas en avant en établissant un système de justice pour mineurs. Malgré le mandat législatif pour la création d’un tribunal pour mineurs dans chaque comté du pays, le seul tribunal pour mineurs se trouve dans le comté de Montserrado. Dans les 15 autres comtés, les tribunaux d’instance font office de tribunaux pour enfants.

L’article 9 de la Loi Libérienne sur les Enfants définit la justice pour mineurs comme un système de lutte contre la délinquance, favorisant la réintégration de l’enfant et son rôle significatif dans la société (Loi sur les Enfants, 2012). Cette clause est fragilisée par ses propres exceptions. Par exemple, les sections 3.3 et 3.4 de l’article 9 autorisent l’emprisonnement et le recours à la violence physique si les autorités, pour la plupart inexperimentées, estiment qu’il n’y a « pas d’autres moyens de sanctionner l’enfant » et que ce n’est pas « abusif » (absence de tribunaux pour enfants).

La perception culturelle d’un manque de responsabilité des mineurs pour certains crimes est renforcée par une interprétation erronée de la loi selon laquelle les mineurs ne peuvent être poursuivis pour des crimes tels que le viol. (United Nations Mission Liberia, 2016) « En raison des croyances traditionnelles et d’une mauvaise compréhension du code de procédure pénale par les forces de l’ordre, les mineurs ayant commis des crimes de violences sexuelles ont été relâchés par la police après avoir été verbalement réprimandés. » (Mission des Nations Unies au Liberia, 2016)

Malgré les engagements pris pour établir un système de justice pour mineurs adapté à l’âge des enfants, les centres de détention et les centres de détention pour mineurs, s’ils existent, sont surpeuplés, manquent d’eau et de nourriture, d’installations sanitaires et de services médicaux adéquats. (Département d’État des États-Unis, 2018)  D’autre part, dans les comtés où les centres de détention sont plus petits, les mineurs sont souvent enfermés dans des cellules individuelles dans les prisons pour adultes.

Écrit par Alexander Weihrauch

Traduit par Élisa Lorcy

Relu par Dominique Jaensch

Dernière mise à jour le 8 mars 2021

Bibliographie :

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[1] Cet article ne prétend en aucun cas donner un compte rendu complet ou représentatif des droits de l’enfant au Libéria. En effet, l’une des principales difficultés est due au peu d’informations mises à jour sur les enfants au Libéria, dont la plupart n’est ni fiable, ni représentative, obsolète ou simplement inexistante.