Enfants de Maurice

Concrétiser les droits de l’enfant sur l’île Maurice

Bien que l’Ile Maurice soit un pays économiquement développé, la pauvreté subsiste. En plus de cette pauvreté, les enfants souffrent de discrimination, de mal-logement, du manque d’éducation et d’exploitation sexuelle. Même si l’État a beaucoup fait dans le domaine du Droit de l’Enfant ces dernières années, les violations restent encore trop fréquentes.

Indice des Droits de l’Enfant: 8,11
Niveau orange :
Problèmes sensibles

Population : 1,27 million
Pop. de 0 à 14 ans : 19,4 %

Espérance de vie : 74,5 ans
Mortalité des moins de 5 ans : 16 ‰

Coup d’œil sur l’Ile Maurice

La République de l’Ile Maurice est un pays insulaire de l’océan Indien. C’est un petit pays voisin de Madagascar, dont la population s’élève à 1,27 million d’habitants. La répartition de la population dans les zones urbaines et rurales est à peu près similaire à son voisin avec 40,8 % de la population vivant en ville et 59,5 % en zones rurales (2018).

La population des jeunes âgés de 0 à 14 ans représente 19,4 % de la population totale ce qui est moins que la plupart des pays géographiquement similaires (Ministère des Finances et du Développement Économique, 2020). Avec la Seconde Guerre mondiale, les problèmes de paludisme et les programmes gouvernementaux, la population et le taux de fécondité de l’île Maurice ont beaucoup varié au fil des années. Toutefois, pour faire face aux ressources limitées du pays et de sa petite taille, le taux de fécondité a été fixé à un niveau plus bas que les autres pays d’Afrique australe.

Actuellement, l’Ile Maurice est considérée comme un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure avec l’une des économies les plus florissantes d’Afrique subsaharienne (avec un revenu par habitant de 7 500 dollars). Le pays a obtenu son indépendance en 1968 et est devenu République en 1992. L’économie de l’île est actuellement majoritairement tournée vers l’extérieur et repose sur l’industrie agroalimentaire, le tourisme et les exportations (Kasseeah, 2020).

Même si l’Ile Maurice est un pays économiquement développé, la pauvreté subsiste. La croissance économique a principalement profité à la classe supérieure, mais elle a aussi contribué à réduire la pauvreté de 8,3 à 7,9 % entre 2007 et 2012 (Banque Mondiale, 2019). La pauvreté extrême, bien que rare, touche une minorité de ménages principalement dans les zones rurales. Certaines familles, en particulier celles venant de la communauté créole, continuent à vivre sous le seuil de pauvreté. Ces familles n’ont pour la plupart pas accès à l’électricité ou à l’eau courante et peinent à nourrir leurs enfants correctement. Ces conditions ne sont pas propices au bon développement des enfants.

La pauvreté a des répercussions néfastes sur les enfants qui souffrent énormément de discrimination, du manque d’éducation et d’exploitation sexuelle. En conséquence, certains enfants de l’Ile Maurice ne peuvent jouir des droits proclamés par la Convention internationale des droits de l’enfant. Cependant, l’État et plusieurs associations non gouvernementales font des efforts pour limiter ces dérives et ainsi améliorer les conditions de vie des enfants du pays.

Statut des Droits de l’Enfant[1]

Avec les derniers changements de gouvernement, l’Ile Maurice s’est davantage concentrée sur le statut des droits de l’enfant dans le pays. En 1990, la Convention a été ratifiée et deux protocoles facultatifs ont été ajoutés. Le pays fait en sorte que ces protocoles soient mieux respectés et travaille à l’ajout de nouveaux protocoles pour renforcer les lois en matière de droits de l’enfant. La loi nommée Child Protection Act visait à aider les enfants vulnérables à la violence. Suite à la mise en œuvre de cette loi, un comité de suivi a été créé pour traiter la question des violences faites aux enfants (Koonjoo-Shah, 2020).

Afin d’introduire de nouvelles législations, le Comité des droits de l’enfant a également adopté le Children’s Bill. Ce projet de loi a réuni en un même texte l’ensemble des lois relatives aux droits de l’enfant et a ainsi amélioré leur mise en œuvre. Ce projet de loi est bien plus complet et moderne que la Child Protection Act déjà en vigueur. La Children’s Bill a permis une meilleure application de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant et de la Convention des Nations unies sur les droits de l’enfant (OHCHR, 2015). 

Cela dit, à l’Ile Maurice, de nombreux problèmes concernant les droits des enfants persistent. La discrimination envers les enfants handicapés et l’exploitation sexuelle des enfants sont encore très répandues. Les lois en la matière sont parfois incohérentes, et pour répondre correctement aux besoins des enfants de l’Ile, les mentalités et les programmes donnant la possibilité aux enfants de bénéficier de tous leurs droits doivent être améliorés.  

Répondre aux besoins des enfants

Droit à la santé

Le système de santé de l’Ile Maurice est généralement bien développé. L’espérance de vie est un bon indicateur pour le mesurer et celle de l’Ile est de 74,5 ans. Les services de santé publique sont gratuits pour tous les citoyens du pays. L’État propose aussi des aides pour les soins prodigués à l’étranger.

Même s’il est plutôt facile d’accéder aux soins de santé, l’organisation au sein du système de santé est loin d’être parfaite. Malgré de nombreux progrès réalisés dans l’encadrement des naissances et dans les soins postnatals, on remarque un fort taux de mortalité infantile (14,5 %) (Banque Mondiale). Ceci est principalement dû à l’éloignement géographique de certaines familles qui n’ont pas accès aux services de santé. La malnutrition infantile et maternelle est aussi un facteur de ce taux de mortalité. La pauvreté extrême de certaines familles les empêche de se nourrir correctement et de fournir les besoins alimentaires de base à leurs enfants.

Pour ce qui est des sources d’eau potable et sanitaire, les Mauriciens auraient pour la plupart accès à l’eau. 99,6 % des habitants ont un accès à l’eau potable à proximité de leur logement et 85 % sont approvisionnés directement chez eux (Recensement de la population et de l’habitat – Maurice 2000). Il est important de souligner que certaines familles ont du mal à accéder à ces sources d’eau.

Droit à la non-discrimination

Des discriminations subsistent encore à l’Ile Maurice surtout envers les enfants handicapés, ceux touchés par le VIH/SIDA, les enfants vivant dans la rue et ceux issus de la communauté créole. Les enfants handicapés sont les plus grandes victimes de la discrimination. Rejetés et parfois même abandonnés par leurs familles, ils sont souvent exclus du système scolaire. La Constitution de la République de l’Ile Maurice ne protège pas les enfants de la discrimination en lien avec le handicap.

L’État a mis en place l’« Equal Oppotunies Commission » (EOC) et la « Commission Justice et Vérité » (CJV) pour créer un meilleur environnement de vie et une meilleure compréhension du multiculturalisme en particulier à l’égard de la communauté créole qui a longtemps été une minorité. Ces mesures ont aidé à combattre les discriminations, mais elles ont aussi été très critiquées. En effet, pour beaucoup, il s’agissait surtout d’un acte symbolique.

Droit à l’éducation

À l’Ile Maurice, l’école est gratuite pour tous les enfants jusqu’aux études supérieures. L’école est obligatoire pour tous jusqu’au niveau secondaire, le taux d’inscription est donc relativement élevé (97 pour cent en 2019) (UNESCO, 2019). L’école tend à être plus inclusive afin que chaque enfant puisse en bénéficier, mais ce n’est pas encore suffisant, les enfants handicapés ne sont pas toujours les bienvenus. Certaines écoles refusent l’accès à ces enfants, car ils ont peur qu’ils ralentissent le rythme d’apprentissage de leurs pairs.

De plus, certaines familles ne peuvent pas inscrire leurs enfants à l’école en ville, ce qui est trop loin de leur domicile. Certains enfants abandonnés vivent dans la rue et sont bien souvent obligés de quitter l’école pour travailler.

Facteurs risques → Problèmes spécifiques au pays

Enfants des rues

À l’Ile Maurice, beaucoup d’enfants en conflit avec leur famille se retrouvent à la rue. Pour la plupart, ils sont âgés entre 11 à 16 ans, ne sont plus scolarisés et travaillent depuis leurs 13 ans. Ces enfants sont livrés à eux-mêmes et sont donc la cible de personnes mal attentionnées (Ndeboc, 2012). Très jeunes, ils sont exposés aux dangers de la rue et vivent dans des conditions déplorables. Ils sont donc très souvent victimes d’abus, de violence, de prostitution, d’addiction et d’exploitation.

Le problème majeur de ces enfants est la dépendance aux drogues. Les jeunes vivant dans la rue sont souvent très pauvres et cela les pousse à consommer de la drogue. Cette consommation peut avoir des conséquences désastreuses sur la vie et la santé de ces enfants. L’utilisation de seringues favorise la propagation du sida et du VIH chez les enfants.

Exploitation sexuelle

Même si l’État mauricien a pris de nombreuses mesures contre l’exploitation sexuelle, de nombreux enfants en sont toujours victimes, particulièrement les jeunes filles. En 20, l’Ile Maurice était l’un des 10 pays les plus touchés par le tourisme sexuel et l’une des destinations majeures des pédophiles en Afrique (Slate Africa). Les facteurs à risques menant à l’exploitation sexuelle sont les suivants : l’addiction aux drogues, le manque d’informations et déduction sur le sujet et la stigmatisation.

Les jeunes filles sont pour la plupart incitées à la prostitution par leurs amis ou par des membres de leur famille. D’autres y sont poussées par des hommes d’affaires ou des chauffeurs de taxi. Les chauffeurs de taxi servent d’intermédiaires. En effet, ils proposent leurs services de transport, mais négocient des arrangements entre les prostitués et ceux qui veulent faire appel à leurs services.

Maltraitance des enfants

Dans la société mauricienne, les châtiments corporels et la maltraitance des enfants font partie du quotidien. Ils sont très répandus au sein de la sphère familiale, mais également à l’école et dans les institutions pénales ou d’aide à la jeunesse. En 2018, 4 200 cas de maltraitance infantile ont été relevés. Cela allait de la violence psychologique à la violence sexuelle (Child Developmental Unit, 2019). À l’île Maurice, les principales causes de maltraitance infantile sont la pauvreté, le mal-logement, les conflits en prison, l’addiction à la drogue et le mauvais équilibre familial. Bien que l’État prenne des mesures pour éliminer les violences faites aux enfants, il n’a pas encore pris de décision concernant la réhabilitation des mineurs qui en sont victimes.

Responsabilité et justice pénale des mineurs

À l’Ile Maurice, l’âge minimum de la responsabilité pénale et le cadre juridique pour l’application de la loi concernant les enfants ne sont pas définis et cette situation est très inquiétante. Maurice n’a pas intégré la Convention internationale des droits de l’enfant à sa législation nationale, ce qui pose de nombreux problèmes par rapport aux droits des enfants. À l’inverse, plusieurs dispositions de la CDE sont présentes dans la Constitution du pays. Il est donc difficile de suivre et d’appliquer correctement ces dispositions (Boodhun, 2014). Pour répondre aux besoins des enfants, des jeunes délinquants et des mineurs et afin de mieux les protéger, il faut que toutes ces procédures soient standardisées.

Écrit par Yagmur Ozturk

Traduit par Élisa Lorcy

Relu par Marion Brasseur de Ordaz

Dernière mise à jour le 8 février 2021

Références:

Mauritius (MUS) – Demographics, health & infant mortality. (2020, February 06). Retrieved from Unicef.

Bowman, L. W. (2021, February 12). Mauritius. Retrieved from Britannica.

Index. (n.d.). Retrieved from Statistics Mauritius.

Mauritius demographics PROFILE. (n.d.). Retrieved February 18, 2021, from Index Mundi.

Kasseeah, H. (2020). How Mauritius’ outward-focused economy survived previous shocks. Dallas Sun.

World Bank. (2019). Poverty & Equity Brief Mauritius. Retrieved from World Bank.

Mauritius at a glance. (n.d.). Retrieved from Moore Mauritius.

OHCHR. (2015). Committee on the rights of the Child reviews report of Mauritius. Retrieved from OHCHR.

Mauritius Assembly. (2020). THE CHILDREN’S BILL Explanatory Memorandum. Retrieved from Mauritius Assembly.

UN. (2004). FRESHWATER COUNTRY PROFILE MAURITIUS Retrieved from the UN.

Zulu, P. M. (n.d.). (2006). EXCLUDED AND INVISIBLE CHILDREN IN AFRICA. Retrieved from Pass.va

Lallmahomed-Aumeerally, N. (2015). Minority rights and anti-discrimination policy in MAURITIUS – the case OF ‘malaise Creole’. International Journal of Cultural Policy, 23(4), 446-463. doi:10.1080/10286632.2015.1069823

Mauritius secondary school ENROLLMENT – DATA, chart. (n.d.). Retrieved from the Global Economy.

Ndeboc, P., Hosenally, M., & Ferhat, I. (2012). STUDY ON STREET CHILDREN IN MAURITIUS. Retrieved from Mauritius Family Planning and Welfare Association.

Sexual Exploitation of Children in Mauritius Submission. (2018). The Universal Periodic Review of the Human Rights Situation in Mauritius. Retrieved from ECPAT International.

Boodhun, K. (2014). A Critical Analysis of the Treatment of Juvenile Offenders in the Mauritian Criminal Justice System. The Third International Conference on Global Business, Economics, Finance and Social Sciences. Retrieved from Global Business Research.


[1]Cet article ne dresse pas un compte rendu complet des Droits de l’Enfant à l’Ile Maurice. En effet, nous disposons de peu d’informations récentes sur les enfants mauriciens et certaines d’entre elles sont peu fiables, obsolètes, voire inexistantes.