La révolution des saris roses en Uttar Pradesh

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Si  l’Uttar Pradesh était un pays, il serait le 5ème état le plus peuplé du monde – autant que le Brésil – mais aussi l’un des plus pauvres, Cet ensemble dans le sous-continent indien est aussi l’un des plus instables politiquement du fait de la corruption et des affrontements entre différents groupes religieux et castes. En conséquence, c’est aussi celui avec le plus haut taux de violence. Dans une Inde en plein changement, la gigantesque région peine à suivre le rythme de la mondialisation qui met en mouvement le pays. Tandis que l’ensemble du pays avait un taux de croissance autour des 8% durant la période 2007-2011, l’Uttar Pradesh lui ne dépassait pas les 6% (de Jacquelot, 2014).

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Dans un pays où les castes, les mariages arrangés et l’honneur sont encore ancrés dans la société et la mentalité, les femmes peinent à s’émanciper. Néanmoins, les choses changent, l’une des leaders des mouvements d’émancipation dans le pays se nomme Sampat Pal Devi. Originaire de la région d’Uttar Pradesh dans le district de Bundelkhand, issue d’une famille nombreuse, elle se bat pour que sa cause soit reconnue.

Un mouvement féministe en Inde

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Sampat Pal Devi dénote dans un pays où les femmes, surtout celles issues de communautés défavorisées, sont bien souvent réduites à la sphère privée. Une femme pour préserver l’honneur de sa famille se doit de rester discrète, ne pas se montrer seule en publique, encore moins s’affirmer en politique. Sampat Pal Devi elle fait tout le contraire, elle prend la parole, défend ses idées et rallie autour de sa cause. Son mouvement, la « révolution des saris roses » aussi appelé le « gang rose » (Gulâbî Gang) s’est fait connaitre sur la scène médiatique mondiale avec ses actions collectives. Composé de milliers de femmes et de quelques hommes, le « gang » est reconnaissable par sa tenue indienne traditionnelle, le sari de couleur rose, l’une des rares non-associée à un mouvement préexistant en Inde. La fondatrice du mouvement est un exemple d’émancipation pour toutes les femmes : mariée à douze ans, enceinte à quinze ans et privée d’éducation, elle se bat pour que les droits de tous mais en particulier ceux des femmes ne soient plus bafoués.

Concrétiser le développement rural grâce à l’éducation, l’emploi et l’émancipation financière des femmes et des filles issues de communautés rurales

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Pardada Pardadi Educational Society (en Hindi, Pardada Pardadi se traduit par arrières grands-parents) est l’une des ces organisations qui souhaite faire changer les choses dans une région où l’aide publique n’est pas suffisante pour satisfaire les besoins d’une population pauvre. Fondée en 2000, par Viendra Singh, l’ONG propose des emplois, des groupes de soutien et un accès à des équipements tels que des toilettes ou des lanternes solaires à des communautés où les opportunités manquent. Mais c’est surtout en matière d’éducation que les résultats impressionnent. L’initiative est une belle réussite et ne fait que grandir d’année en année : de 45 en 2000, les écoles réunissent dorénavant plus de 1200 jeunes filles. Chaque année, une jeune fille ayant effectué sa scolarité dans l’association est choisie pour poursuivre ses études dans une université américaine. Afin d’encourager les familles à envoyer leurs filles à l’école, Pardada Pardadi offre 10 roupies par journée de présence en classe. Cette initiative économique produit des résultats académiques exceptionnels avec 100% de réussite aux examens régionaux en 10th et 12th grade (équivalent aux classes de Seconde et Terminale). Zoe Mariam Kasujja, étudiante en droit à l’Université de Nottingham, interne en 2016 dans les bureaux de l’ONG à Delhi a eu l’occasion de se rendre dans les écoles gérées par Pardada Pardadi. Elle témoigne de la vivacité des jeunes filles : on ne leur apprend pas uniquement des bases académiques, une emphase est aussi mise sur le développement personnel notamment la prise de parole en public. C’est dans un excellent anglais que les écolières s’expriment avec confiance une langue qu’elles ne pratiquent pas dans leur vie quotidienne et dont les locuteurs sont peu nombreux dans leur communauté.

L’Uttar Pradesh est un exemple de l’ambivalence existant au XXIème siècle entre le développement économique et le développement humain, néanmoins, des initiatives venant de toute part de la société permettent d’envisager un avenir plus égalitaire pour ce qui représente l’une des plus grandes force démographique mondiale.

Écrit par : Lisa Senty
Relu par : Petra Friedmann

Sources