La guerre civile syrienne

La guerre civile syrienne
15 mars 2011 – aujourd’hui

 

Destruction in Bab Dreeb area in Homs, Syria - by Bo yaser

 

L’origine du conflit

Suite aux soulèvements populaires qui ont eu lieu dans différents pays du Moyen-Orient notamment en Tunisie et en Egypte, et qui ont donné naissance au  mouvement que l’on connait désormais comme le “Printemps arabe”, le peuple syrien réclame lui aussi davantage de libertés au régime existant depuis  février 2011.

 

Les parties prenantes

Le gouvernement et l’armée, dirigés par Bachar el-Assad, président de la Syrie depuis 2000, affrontent une révolte d’abord populaire. Mais l’opposition saisit bientôt les armes et s’organise. Différentes factions voient le jour, allant de l’Armée Syrienne Libre au Front Islamique, en passant par le Front Révolutionnaire Syrien.

 

L’embrasement du conflit

Les premières manifestations visant à obtenir plus de libertés se déroulent pacifiquement mais sont violemment réprimées. L’armée syrienne tire à balles réelles sur les citoyens,  utilise des chars pour enrayer les démonstrations et commet des actes de barbarie à l’encontre de manifestants de tout âge, incluant torture et exécutions arbitraires. Ces excès de violence attisent la colère du peuple. Des combats font rage dans la rue, aussitôt combattus avec les mêmes excès de force par le gouvernement.

Plus le peuple gronde, plus les répressions sont sanglantes, et vice versa. Un cercle vicieux est en marche, et une guerre civile éclate sur l’ensemble du territoire syrien.

A Free Syrian Army fighter by Jordi Bernabeu Farrus

Les prises de position sur le plan international

La Syrie n’est plus seulement le terrain d’affrontement du régime en place et des citoyens soulevés contre Bachar el-Assad ; la communauté internationale a en effet pris position sur le conflit, mais est divisée sur le sujet.

Le gouvernement syrien bénéficie de l’appui de l’Iran, mais également du soutien diplomatique de la Russie et de la Chine, qui sont tous deux membres permanents au Conseil de Sécurité des Nations Unies. C’est d’ailleurs uniquement à cause du droit de veto exercé par Moscou et Pékin qu’à plusieurs reprises, aucune mesure n’a pu être prise à l’encontre de la Syrie. Le Vénézuela, l’Algérie et l’Irak sont également acquis à la cause de Bachar el-Assad.

La rébellion syrienne, de son côté, profite d’un large soutien diplomatique et de l’assistance militaire de la Ligue des Etats arabes et des Etats-Unis. Cette coalition a non seulement armé et formé des rebelles syriens, mais a aussi entrepris des bombardements aériens depuis septembre 2014.

Des acteurs non étatiques se sont aussi immiscés dans le conflit. Ainsi, le  Hezbollah défend la position du gouvernement de Bachar el-Assad, tandis que Ayman al-Zawahiri, le chef de Al-Qaïda, a affiché son soutien à la révolution syrienne en février 2012. L’Etat Islamique est en outre également partie à la guerre et se bat aux côtés de l’opposition syrienne.
La guerre qui  fait rage en Syrie a donc engendré un bras de fer international symbolique entre plusieurs idéologies politiques, mais aussi religieuses. C’est pour cette raison qu’aucune intervention extérieure significative n’a jusqu’à présent été envisageable.

 

Les violations les plus flagrantes des droits de l’homme

Un conflit armé implique son lot d’atrocités en tout genre. Toutefois, le droit international humanitaire, en particulier les 4 Conventions de Genève de 1949, fixent des limites à la cruauté des hommes en temps de guerre, afin de garantir le respect des droits humains, et surtout de la dignité humaine. Ainsi, même si toute perte humaine reste déplorable, la mort de soldats engagés sur le front est par exemple tolérée ou du moins compréhensible, alors que tuer de civils qui ne prennent pas part aux hostilités est au contraire incriminable. 

En Syrie, bien trop souvent, des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire sont perpétrées, aussi bien par le régime de Bachar el-Assad que par les forces révolutionnaires.

Civilians flee from fighting by Nasser Nouri

En 2011 déjà, Human Rights Watch impute à l’Etat syrien des meurtres, des pratiques tortionnaires, des emprisonnements arbitraires et des disparitions forcées. Ces pratiques étant répandues et ayant lieu de manière systématique à l’encontre de la population civile, elles représentent des crimes contre l’humanité. La Commission d’enquête internationale indépendante de l’ONU met pour sa part en lumière l’utilisation d’hôpitaux comme lieux de détention et de torture ainsi que le viol, la torture et le meurtre d’enfants.

Le 21 août 2013, un bombardement chimique sur la population civile a lieu. Ban Ki-Moon, le secrétaire générale de l’ONU, condamne cet acte qui constitue un crime de guerre et viole plusieurs principes du droit international.
Par ailleurs, depuis que les manœuvres militaires de l’alliance entre la Ligue des Etats arabes et les Etats-Unis ont commencé, des civils meurent régulièrement suite à des bombardements aériens.

La guerre civile syrienne est ainsi devenue synonyme d’une violation perpétuelle des droits humains les plus élémentaires, car c’est quotidiennement que des actes d’une violence écœurante sont perpétrés par les deux camps.

 

Les enfants victimes

Dans leur innocence, les enfants syriens sont des victimes particulièrement vulnérables de la guerre. Sans même comprendre ce qui se passe ni pourquoi, ils sont quotidiennement  exposés à des actes d’une violence inimaginable. Même s’ils en ressortent physiquement indemnes, les séquelles psychologiques demeurent et leur avenir reste compromis. Les horreurs auxquelles ils assistent leur volent la naïveté et la stabilité émotionnelle auxquelles ils ont pourtant droit.

 

Enfants tués

Le 16 avril 2015, l’Observatoire syrien des droits de l’homme recense la mort de 220’000 ressortissants syriens depuis le début de la guerre, mais au vu de l’incertitude entourant le sort de certains détenus ou disparus, il y aurait en réalité plus de 310’000 personnes qui auraient perdu la vie. Ces chiffres effrayants correspondent à environ 150 à 200 individus tués chaque jour.

Parmi ces pertes, l’Observatoire syrien déploreAmericans Who Have Not Read a Single Article About Syria Strongly Support Bombing It by Peter Stevens la mort de plus de 11’000 enfants. D’après le Conseil national syrien, ils seraient jusqu’à 14’000, dont 70% de garçons. La même source documente les causes des décès. Les 2/3 des victimes auraient ainsi succombé à des bombardements, mais on dénombre aussi par exemple des cas de blessures par balles, de tirs ciblés de snipers, d’égorgement ou de mort sous torture.

 

Enfants réfugiés et déplacés

Les enfants qui survivent aux massacres sont des êtres marqués au plus profond de leur chair et de leur esprit par les horreurs qu’ils ont vécues. L’Unicef estime leur nombre à 14 millions après 4 ans de conflit. Ces enfants sont souvent orphelins, ont vu un proche mourir, ou ont été victimes ou témoins de violence sans nom, comme l’illustrent des témoignages glaçants rassemblés par l’organisation “Save the Children” dans un rapport intitulé “Untold Attrocities”. Certains font partie des près de 4 millions de Syriens qui ont fui leur pays pour atteindre les pays voisins que sont le Liban, la Jordanie, l’Irak, l’Egypte et la Turquie, sans espoir réel d’y trouver un avenir meilleur. D’autres, au nombre de 5 millions et demis, se trouvent toujours sur territoire syrien, en proie à des violences quotidiennes. La moitié d’entre eux ne peut pas fréquenter d’école ou de centre de formation.

The Hussayniye camp for Syrian refugees just two miles from the Syrian border. by Trocaire

 

Problèmes sanitaires

Suite aux bombardements et affrontements, 60 à 70% des hôpitaux et dispensaires syriens ont été détruits ou endommagés en mars 2014, selon le rapport “En état de siège” de l’UNICEF. Le personnel médical a en partie fui le conflit. Les réseaux d’eau potable ont également subi les ravages de la guerre et l’accès à la nourriture est de plus en plus compliqué.new arrivals in Lebanon by CAFOD Photo Library -Eoghan Rice Trocaire
Cette situation se traduit notamment par une prise en charge lacunaire des blessés, une diminution des vaccinations et des taux élevés d’enfants atteints de maladies dangereuses. La poliomyélite est réapparue, et, en l’absence de soins adaptés, menace la vie des plus jeunes au même titre que la rougeole, la pneumonie ou la diarrhée.

 

Enfants soldats

En 2014, Human Rights Watch publie le rapport “Maybe We live and Maybe We Die  – Recruitement and Use of Children by Armed Groups in Syria”. Dans ce document, l’ONG informe de l’utilisation d’enfants soldats par des groupes armés non-étatiques, une pratique contraire au droit international et qualifiable de crime de guerre.
Le nombre exact des garçons dont il est question, âgés en moyenne de 10 à 16 ans, est inconnu. Toutefois, en mai 2014, on connaissait l’existence avérée de 200 enfants soldats en Syrie.

Les méthodes de recrutement Azaz, Syria, by Christiaan Triebertvarient. Alors que certains groupes armés cherchent clairement à séduire de jeunes garçons afin qu’ils rejoignent leurs rangs, d’autres feraient simplement preuve d’un manque de zèle lors de la vérification des papiers d’identité. Les rôles attribués peuvent quant à eux aller de l’espionnage au combat sur le front, en passant par le soin des blessés ou la torture de détenus.

 

Drames en mer Méditerranée

Alors qu’en 2014, plus de 850’000 demandes d’asile ont été déposées à travers le monde, soit le nombre le plus élevé depuis les vingt dernières années, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés confirme qu’un cinquième de ces demandes provient des seuls ressortissants syriens. La Turquie, l’Italie, l’Allemagne et la Suède font partie des pays les plus sollicités.

The sailors and Royal Marines of HMS Bulwark help migrants ashore. Picture by Royal Navy Media Archiv  Carl OsmondOr, pour rejoindre ces contrées plus sûres, les réfugiés syriens sont la plupart du temps condamnés à traverser la mer Méditerranée. Un commerce juteux et complètement illégal a dès lors vu le jour, et les migrants désespérés paient des prix exorbitants à des passeurs criminels afin de pouvoir embarquer sur des embarcations sommaires et surpeuplées. Les naufrages en pleine mer deviennent par conséquent de plus en plus courants.

Sur l’ensemble de l’année 2014, on relevait près de 3500 pertes humaines lors d’une tentative de traversée de la Mer Méditerranée. En avril 2015, la moitié de ce macabre chiffre était déjà atteinte.
De nombreux enfants sont les victimes de ces noyades. Les survivants ont vu l’horreur et la mort au plus près, ils ont parfois perdu un proche au cours de la traversée. Et une fois arrivés sur sol européen, ils ne sont pas au bout de leurs peines. Ne parlant pas la langue, ne sachant parfois même pas vraiment où ils se trouvent, ils sont désormais confrontés à la réticence des Etats européens à les accueillir et au manque de moyens de certains camps de réfugiés débordés.

 

Mariage d’enfants

Certains problèmes qui existaient bien avant le conflit se sont intensifiés. Ainsi, alors que le mariage de filles mineures n’est pas un phénomène nouveau en Syrie, sa proportion a doublé dans certains camps de réfugiés jordaniens, où il représente désormais 25% des unions enregistrées. Dans près de la moitié des cas, les fillettes épousent un homme qui est d’au moins dix ans leur aîné.

Syrian refugee children by mehmet bilginLes raisons qui expliquent l’augmentation des mariages d’enfants syriennes sont diverses. “Save the Children” explique dans un rapport intitulé “Too Young to Wed” que le plus souvent, ces mariages sont arrangés afin de protéger les jeunes filles des formes de harcèlement sexuel malheureusement très courantes dans les camps de réfugiés. Parfois, c’est suite à un viol, afin de réhabiliter l’honneur de la victime, qu’une union est célébrée. Marier sa fille revient aussi à réduire le nombre de bouches à nourrir dans sa famille, ce qui, au vu des conditions dans lesquelles les réfugiés syriens vivent, est loin d’être insignifiant. D’autres unions ont été célébrées avant même de quitter le territoire syrien, en vue de donner au couple plus de chances d’être accueilli dans un autre Etat.

 

Abus en tout genre

Syrian Refugee bx Bengin AhmadAu vu du désordre qui règne aussi bien en Syrie que dans les camps de réfugiés, les enfants, dû à leur vulnérabilité, en particulier s’ils sont orphelins ou séparés de leurs proches, se retrouvent sans défense face aux risques d’abus sexuels ou de violence. Ils représentent par ailleurs des proies faciles pour les trafiquants qui les destinent au travail forcé ou à l’exploitation sexuelle.
Les informations à ce sujet manquent, mais les témoignages et rumeurs qui filtrent déjà ne laissent présager que du pire.

 

Les perspectives d’avenir

Les citoyens syriens ont tout perdu. La Syrie d’aujourd’hui n’est plus le pays tant aimé dans lequel ils vivaient avec leurs proches, dont beaucoup sont morts. Tout ce qu’ils connaissaient et chérissaient a disparu. Forcés de fuir, ils se retrouvent dans des situations précaires et ne sont accueillis nulle part. Les plus jeunes enfants n’ont rien connu d’autre dans leur vie que la guerre et la destruction, et les adolescents, qui se trouvent au tournant de leur vie, n’ont pas la possibilité de se construire un futur. L’Unicef évoque le risque d’être confronté à une génération perdue.

Syrian girls, carrying school bags provided by UNICEF by Jordi Bernabeu Farrus

Toutefois, le pessimisme n’est pas encore de mise. De nombreuses ONG et organismes internationaux continuent à soutenir les ressortissants syriens et appellent aux dons pour les aider dans leurs actions.
Si l’avenir de la Syrie est incertain, ce qui est sûr en revanche, c’est que la solidarité est la meilleure arme que nous ayons pour combattre les horreurs endurées par le peuple syrien.


Sources

Sources principales
Chronologie de la révolte syrienne
Observatoire syrien des droits de l’homme
Conseil national syrien

Informations générales Wikipédia
Guerre civile syrienne
Printemps arabe
Bachar el-Assad

Vetos au Conseil de sécurité
Article Huffington Post
Article rfi

Crimes contre l’humanité et crimes de guerre
Article HRW 01.06.2011
Article HRW 15.12.2011
Article Le Monde
Centre d’actualité de l’ONU

Situation des enfants
Article UNICEF 12.03.2015
Rapport UNICEF « Syria Crisis – 4 Years on »
Article DW
Rapport Save the Children « Untold Attrocities »
Article UNICEF 10.03.2014

Problèmes sanitaires
Rapport UNICEF « En état de siège »
OMS

Réfugiés
Statistiques UNHCR
European University Institute
Article UNHCR

Drames en Méditerranée
Article UNCHR 10.12.2014
Article UNHCR 21.03.2015
Article UNHCR 26.03.2015

Enfants soldats
Rapport HRW « Maybe We Live and Maybe We Die »

Mariages d’enfants
Rapport Save the Children « Too Young to Wed »

Abus
The Trafficking Research Project
Trafficking in Persons Report

 

Photos

Destruction in Bab Dreeb – Bo Yaser
A FSA fighter – Jordi Bernabeu Farrùs
Civilians flee  – Nasser Nouri
Bombing Syria – Peter Stevens
Hussayniye camp – E. R. Trocaire
Arrivals in Lebanon – E. R. Trocaire
Azaz, Syria – Christiaan Triebert
Sailors  help migrants – Carl Osmond
Refugee children – Mehmet Bilgin
Syrian refugee – Bengin Ahmad
Syrian girls – Jordi Bernabeu Farrùs

 

 

Rédigé par : Valentine Delarze
Relu par: Suzanne Corpet

Dernière mise à jour: 17 mai 2015