Concrétiser les droits de l’enfant en Gambie
La République de Gambie a ratifié la Convention des Nations Unis relative aux droits de l’enfant 1989 (CNUDE, 1989) en 1990. Le pays a aussi ratifié le Protocole facultatif sur la CNUDE 1989 concernant la vente d’enfants, la prostitution d’enfants ainsi que la pornographie mettant en scène des enfants. Malheureusement, la prostitution infantile, les abus sexuels sur les enfants et le trafic d’enfants à des fins sexuelles constituent un problème important en Gambie, contrairement à d’autres régions du monde.
Indice des Droits de l’Enfant: 5,94 / 10
Niveau noir: Situation très grave
Population : 2,28 millions
Pop. de 0 à 14 ans : 44,1%
Espérance de vie : 61,7 ans
Mortalité des moins de 5 ans : 51,7‰
La Gambie en bref
La Gambie est le plus petit état d’Afrique de l’Ouest. Le pays est bordé par l’océan Atlantique et le Sénégal au nord, à l’est et au sud (Secrétariat, Commonwealth, 2020). Le pays est également l’un des pays les plus densément peuplés du continent. L’histoire précoloniale révèle que le pays est étroitement lié au Sénégal, pays limitrophe, et ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle qu’une distinction a été faite entre la Gambie et le Sénégal, jusqu’alors, la région était nommée la Sénégambie (Clark, 2020).
Suite à la conférence de Berlin en 1884, une colonisation de l’Afrique a eu lieu. En 1889, la France cède le contrôle du fleuve Gambie au Royaume-Uni et c’est à ce moment que les frontières actuelles de la Gambie se sont dessinées. En 1965, la Gambie est devenue indépendante du Royaume-Uni et cinq ans plus tard, une nouvelle constitution, approuvée par référendum en avril 1970, a transformé la nation en une république (Clark, 2020).
Le fleuve Gambie est la principale voie navigable du pays. Il part de la Guinée et traverse le Sénégal et la Gambie (Secrétariat, Commonwealth, 2020). Le fleuve Gambie est l’une des plus belles voies navigables d’Afrique et le seul fleuve d’Afrique occidentale qui soit facilement accessible au transport maritime. Il forme un facteur d’unification pour l’État indépendant de Gambie, qui consiste en une étroite bande de terre le long des deux rives du fleuve.
Statut des droits de l’enfants [1]
La Gambie a ratifié la CNUDE1989 le 8 aout 1990 (HCDH, 2020). La Gambie a aussi ratifié les principaux traités internationaux visant à protéger le bien-être des enfants et à sauvegarder leurs droits ; à savoir les Protocoles facultatifs sur la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie infantile (ratifié le 8 avril 2010) ainsi que sur l’implication des enfants dans les conflits armés (ratifié le 27 septembre 2019) (HCDH, 2020).
Cependant, la Gambie, comme la majorité des États, doit encore ratifier le Protocole facultatif de Procédure de Communication 2011 (Recueil des traités des Nations unies, 2020). Les Protocoles facultatifs complètent et s’ajoutent aux traités existants. Ils sont facultatifs car les obligations peuvent être plus exigeantes que celles de la convention originale (UNICEF, 2020). Ainsi, les États doivent décider de manière indépendante s’ils veulent ou non être liés par ces obligations (UNICEF, 2020). Les protocoles facultatifs sont des traités à part entière et sont ouverts à la signature, à la ratification ou à l’adhésion.
D’un point de vue régional, la Gambie a ratifié la Charte Africaine des droits et du bien-être de l’enfant 1990 (ACRWC 1990) le 14 décembre 2000 (ACERWC, 2020). En Outre, la Gambie a ratifié le Protocole à la Charte Africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique (Union africaine, 2020). Le Protocole fait spécifiquement référence aux enfants et aux filles en particulier. Par ailleurs, le préambule appelle à la condamnation et à l’élimination de toute « pratique qui entrave ou met en danger la croissance et affecte le développement physique, émotionnel et psychologique des femmes et des filles » (ONU, 2020).
De plus, le Protocole condamne explicitement les pratiques néfastes telles que les mutilations génitales féminines (MGF) et la scarification qui affectent les droits humains fondamentaux des femmes et des filles et sont contraires aux normes internationales reconnues (ONU, 2020). Conformément à la constitution de la Gambie de 1997, l’article 29, paragraphe 1, garantit que tous les enfants nés en Gambie ont le droit à une identité et que l’intérêt supérieur de l’enfant est reconnu (Human Right Library, 2020). L’article 30 de la constitution quant à lui, reconnaît le droit fondamental à l’éducation pour tous les enfants. La constitution de la Gambie est complétée par la Loi sur l’enfance de 2005 (The CA 2005). La Loi sur l’enfance est la principale loi concernant les droits de l’enfant en Gambie (Forum africain de l’enfance, 2020).
La CA 2005 couvre effectivement les principes fondamentaux des droits de l’enfant, ce qui n’a toutefois pas dissuadé ses détracteurs. Le Comité des droits de l’enfant des Nations unies s’est dit préoccupé par le fait que la Loi « ne couvre pas tous les domaines visés par la convention, notamment les questions liées au mariage des enfants, aux mutilations génitales féminines et au travail des enfants, elle n’a pas été efficacement appliquée et suffisamment diffusée » (Comité des droits de l’enfant des Nations unies (CDE), 2015). Les observations faites par le Comité des Nations Unies sur la CA sont valables et la Gambie doit chercher à résoudre ces problèmes qui continuent de persister et de porter préjudices aux droits des enfants gambiens.
Répondre aux besoins des enfants
Droit à l’éducation
En 2010, il y avait encore des lacunes importantes dans la garantit du droit à l’éducation des enfants les plus défavorisés (UNICEF, 2011). Quelque 31,6% des enfants âgés de 7 à 15 ans n’étaient pas scolarisés (Ministère gambien de l’éducation primaire et secondaire (MoBSE)/Banque mondiale/UNESCO, 2010). Les enfants les plus défavorisés se trouvent dans les régions orientales du pays, ou une pauvre jeune fille gambienne n’a pratiquement aucune chance de terminer l’éducation primaire (Ministère gambien de l’éducation primaire et secondaire (MoBSE)/Banque mondiale/UNESCO, 2010). Près de la moitié des coûts de l’éducation doivent être financés par les ressources des ménages, représentant une charge importante pour beaucoup de familles.
Au cours des dix dernières années, la Gambie a cherché à développer ses activités en faveur de la petite enfance et notamment ses services d’éducation préscolaire (UNICEF, 2018). De 2007 à 2017, il y a eu une augmentation assez importante de la couverture préscolaire : elle est passée de 20% en 2007 à 38% en 2017. Le taux d’inscription est passé d’environ 42 400 enfants en 2007 à un peu moins de 104 000 en 2017 (UNICEF, 2018). Il n’en reste pas moins que 62% des enfants manquent d’accès aux activités préscolaires. Dans le cadre de sa politique de développement de la petite enfance 2016-2030, le pays prévoit de porter la couverture préscolaire à 60% d’ici 2030 (Ministère de l’éducation primaire et secondaire (MoBSE), 2016).
Le secteur de l’éducation en Gambie se développe chaque année, ce qui pose un défi au gouvernement pour répondre aux besoins de financement croissants nécessaires pour suivre cette croissance constante en termes de salles de classe, de matériel d’apprentissage et d’enseignants (UNICEF, 2020). Le secteur de l’éducation présente d’importants bouchons qui empêchent une prestation de service de qualité équitable (UNICEF, 2020). L’enseignement préscolaire n’est pas suffisamment développé, tant en ce qui concerne les programmes que sur la capacité de poser des bases solides pour l’apprentissage tout au long de la vie (UNICEF, 2020).
En outre, les enfants handicapés ont un accès limité à l’éducation en raison des normes sociales et des limitations structurelles (UNICEF, 2020). L’éducation secondaire pour les filles est en grande partie inexistante en raison de la plus grande valeur accordée au mariage, par rapport à l’éducation et au développement de carrière. Le rôle des garçons en tant que futurs « gagne-pain » de famille a également pour conséquence que certaines d’entre elles poussent leurs adolescents à se lancer dans le dangereux voyage vers l’Europe à la recherche de richesses pour apporter un soutien direct à leur famille (UNICEF, 2020).
Droit à la santé
Malgré les meilleurs efforts pour promouvoir le niveau de santé nécessaire au développement des enfants, le secteur de la santé reste relativement faible, avec une infrastructure physique qui se détériore et un manque de fournitures et d’équipements adéquats (UNICEF, 2020). Selon les enquêtes à indicateurs multiples (MICS) en 2018, la mortalité des moins de cinq ans en Gambie est de 57 pour 1000 enfants nés vivants, la mortalité infantile est de 41 pour 1000 enfants nés vivants et la mortalité néonatale de 31 pour 1000 enfants nés vivants (MICS, 2019).
Cela indique que le secteur de la santé progresse dans la réduction des taux de mortalité. Par ailleurs, la prévalence du retard de croissance chez les enfants de 0 à 59 mois est passée de 23,4% (MICS, 2010) en 2010 à 19% en 2018. Cependant, le retard de croissance reste relativement élevé dans les zones rurales telles que Kuntaur (26,6%), Janjangbureh (24,3%) et Kerewan (20,8%), contre 16,6% à Banjul et 14,4% dans la municipalité de Kanifing. Les statistiques confirment les fortes disparités entre les zones rurales et les zones urbaines (UNICEF, 2020).
Malgré ces défis, la Gambie continuer de progresser en matière de couverture de soins de santé primaires (SSP), notamment en ce qui concerne la couverture vaccinale (UNICEF, 2020). La Gambie a régulièrement enregistré une couverture vaccinale supérieure à 90% pour trois doses de diphtérie, de tétanos et de coqueluche (DTC), souvent considérés comme la mesure de performances nationales en matière de vaccination. Toutefois, avec l’augmentation du nombre d’enfants vaccinés, on a assisté à une quasi-stagnation des couvertures vaccinales au cours des dernières années, avec des couvertures déclarées de 92% en 2017 et de 93% en 2018 (UNICEF, 2020).
La malnutrition sous toutes ses formes reste un défi majeur en Gambie (UNICEF, 2020). De nombreux enfants, en particulier dans les zones rurales, sont mal nourris et ce pour plusieurs raisons, allant des dispositions institutionnelles et de l’insuffisance des ressources nationales aux problèmes liés à la qualité de la prestation de services (UNICEF, 2020). Certains des problèmes mis en évidence concernent l’insuffisance des effectifs, le financement insuffisant et imprévisible, et la nécessité de renforcer la coordination des aides alimentaires (UNICEF, 2020).
La Gambie s’est engagée à combler les lacunes restantes dans le cadre des objectifs de développement durable (ODD), en particulier pour lutter contre la faim, réduire l’insécurité alimentaire et la malnutrition et promouvoir une agriculture durable et des systèmes alimentaires plus solides d’ici 2030 (Programme alimentaire mondiale des Nations unies, 2020). Par le biais du Plan National de Développement (PND) 2018-2021, le gouvernement de Gambie s’est engagé à renforcer les secteurs productifs et à assurer une nutrition optimale pour sa population et l’autosuffisance alimentaire du pays. Cela doit être fait spécifiquement en éliminant la faim et en garantissant l’accès à une alimentation sûre, nutritive et suffisante tout au long de l’année et pour tout le monde, en particulier pour les plus démunis et les personnes en situation de vulnérabilité, y compris les femmes et les enfants de moins de cinq ans (Programme alimentaire mondiale des Nations unies, 2020).
Droit à l’eau et à l’assainissement
En Gambie, 61,8% de la population à accès à des installations sanitaires améliorées, 1% pratique encore la défécation en plein air et seulement 30,9% de la population se lave les mains avec du savon ou d’autres détergents (UNICEF, 2020). Des efforts considérables ont été déployés ces dernières années pour garantir l’accès à l’eau potable (UNICEF, 2020). En Gambie, les enfants et leurs familles ont bénéficié d’un approvisionnement en eau potable amélioré et équitable, 90% de la population ayant accès à de meilleurs approvisionnements d’eau en 2018, contre 86% en 2010.
Cependant, seulement 34% (un tiers) des ménages utilisent des services d’eau potable gérés de manière sûre. En outre, selon l’enquête MICS, 84 724 enfants (43 512 filles et 41 212 garçons) ont eu accès à l’eau potable et aux services d’assainissement, et ont adoptés des pratiques et des comportements d’hygiène améliorés, ce qui contribue à la proportion nationale de 90% de la population ayant accès à de meilleurs approvisionnements en eau (MICS, 2019). Avec 62% d’installations sanitaires améliorées, 31% de la population se lavent les mains avec du savon (MICS, 2019).
Conformément à l’indicateur des ODD pour l’assainissement, seuls 47% de la population des ménages ont accès à un niveau de service basique (MICS, 2019). La proportion des membres des ménages disposant d’un lavabo où l’eau et le savon ou détergent sont présents reste faible, à 31%, contre 30,3% en 2010, ce qui nécessite des efforts accrus (MICS, 2010). L’insuffisance de l’approvisionnement en eau et l’amélioration de l’assainissement dans les écoles, ainsi que dans les établissements de soins et les lieux publics restent un défi (UNICEF, 2020).
La diarrhée, qui est liée à de mauvaises pratiques d’assainissement et d’hygiène, représente 7% de la mortalité des moins de cinq ans et les mauvaises pratiques d’hygiène contribuent encore à une forte malnutrition et aux infections néonatales (UNICEF, 2020). Il est primordial de maintenir une couverture vaccinale élevée et d’améliorer la qualité et l’accès équitable aux services de vaccination afin de garantir que tous les enfants, de toutes les communautés, bénéficient de toutes leurs vaccinations de bases (UNICEF, 2020). Une faible couverture parmi les groupes pauvres ou marginalisés menace de compromettre les progrès réalisés dans l’extension de la couverture et crée une possibilité d’épidémies potentielles (UNICEF, 2020). Cela souligne encore plus l’importance de la vaccination des enfants afin qu’ils aient la possibilité de s’épanouir et d’avoir une meilleure chance de réaliser pleinement leur potentiel (UNICEF, 2020).
Droit à l’identité
L’enregistrement des naissances est un droit inhérent de tout enfant, énoncé à l’Article 6 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant 1990 (ACERWC), qui stipule que « tout enfant doit être enregistré immédiatement après sa naissance » (Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, 2020). L’absence d’enregistrement de naissance peut nuire gravement à la survie, au développement et à la protection des enfants de diverses manières (UNICEF, 2020). L’enregistrement de naissance garantit aux enfants l’accès aux services de base tels que la santé, la protection sociale et l’éducation, et les protège contre le travail forcé, l’exploitation, le trafic et le mariage forcé (UNICEF, 2020).
L’article 7, paragraphe 2, de l’AC 2005 stipule clairement également que : « la naissance de tout enfant doit être enregistrée » (Forum African Child, 2020). Malgré cette obligation claire, l’enregistrement des naissances en Gambie nécessite encore des améliorations importantes. Selon les enquêtes du MICS concernant les enfants enregistrés, le taux est passé de 52,5% en 2010 à 57,9% en 2018, mais seulement 32,3% des enfants de moins de cinq ans ont un certificat de naissance (UNICEF, 2020) (MICS, 2019). En outre, il existe une disparité entre les sexes dans les enregistrements de naissances en Gambie, les garçons étant plus souvent enregistrés que les filles, avec respectivement 59,5% et 56,2% (UNICEF, 2019). Parmi les obstacles à l’enregistrement en Gambie, on peut citer la rigidité du processus d’enregistrement de naissances, la faible sensibilisation de l’importance de l’enregistrement des naissances et la distance à parcourir pour se rendre au bureau d’enregistrement le plus proche.
Facteurs de risques → Les défis propres au pays
Le trafic d’enfants
La Gambie est un pays d’origine, de transit et de destination pour le trafic d’enfants à des fins sexuelles (ECPAT International, 2015). Des enfants gambiens et étrangers, provenant des pays voisins d’Afrique de l’Ouest, sont victimes de ce trafic, en particulier à destination de Banjul, à des fins d’exploitation sexuelle par des ressortissants gambiens et des touristes. L’économie de la Gambie est fortement dépendante de l’industrie du tourisme ; en fait, l’économie de la Gambie tire près d’un cinquième de son PIB du tourisme (Index Mundi, 2021). Cette forte dépendance à l’égard du tourisme, associée à des niveaux de pauvreté élevés et à un système de protection de l’enfance faible, peut rendre les enfants de Gambie extrêmement vulnérables à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales.
La protection des enfants contre le trafic à des fins sexuelles est l’un des domaines les plus développés du droit en Gambie. Il existe de nombreuses dispositions législatives et politiques pour combattre, protéger et aider les enfants victimes du trafic (ECPAT International, 2015). La loi de 2007 sur le trafic des personnes (Trafficking Act 2007) interdit explicitement toutes les formes de trafic, y compris le trafic d’enfants à des fins sexuelles (Forum African Child, 2021). La loi de 2010 (amendement) sur le trafic des personnes (avis de la Gazette, 2021) a criminalisé le trafic sexuel et le trafic de travailleurs, et prévoit des peines de 50 ans d’emprisonnement à la perpétuité, et une amende de 50 000 à 500 000 dalasi (980 à 9 800 dollars) (Département d’États des États-Unis, 2021).
Ces peines sont suffisamment strictes et, en ce qui concerne le trafic sexuel, proportionnelles aux peines prévues pour d’autres crimes graves tels que le viol (Département d’États des États-Unis, 2021). Des organisations internationales ont signalé que la corruption des fonctionnaires, notamment des policiers demandant des pots-de-vin pour enregistrer des plaintes de trafic, a entravé les efforts de la police (Département d’États des États-Unis, 2021).
Travail et exploitation d’enfant
Au cours des dernières années, la Gambie a fait des efforts mesurés pour éliminer les pires formes de travail des enfants. Le gouvernement a signé et ratifié les principales conventions internationales concernant le travail des enfants, telles que la Convention internationale sur les pires formes de travail des enfants (Organisation internationale du travail, 2021), la Convention internationale sur l’âge minimum (Organisation internationale du travail, 2021) et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (HCDH, 2020).
En outre, la Gambie a également créé le Comité national de coordination sur le travail des enfants, chargé de mener des enquêtes sur le travail des enfants et de rationaliser le processus de poursuite des criminels liées au travail des enfants (Bureau des affaires internationales du travail, 2021). Aussi, le gouvernement a augmenté le nombre de membres du Comité communautaire de protection de l’enfance de 31 à 70 et a fondé 15 centres de protection de l’enfance pour surveiller, identifier et signaler les cas potentiels des pires formes de travail des enfants. Toutefois, des lacunes subsistent pour protéger correctement les enfants contre le travail forcé, qui est surtout répandu dans le secteur du tourisme (où les enfants sont exploités sexuellement) et dans l’agriculture (en particulier dans les zones rurales, la mendicité dans les rues et le travail domestique dans les zones urbaines) (Organisation internationale du Travail, 2021).
Une partie du problème est le manque d’harmonisation des dispositions clés telles que celles de l’AC 2005 et du Code du travail (Organisation internationale du travail, 2021) qui réglementent les apprentissages et garantissent que les enfants ont au moins 14 ans pour les apprentissages sur le lieu de travail (Bureau des affaires internationales du travail, 2021). De plus, l’âge légal pour travailler en Gambie est de 16 ans, et de 18 ans pour les travaux qualifiés de dangereux (Newgarden, 2021). Pourtant, les enfants travaillent souvent afin d’aider financièrement leur famille et le gouvernement ne réussit pas à mener des inspections.
Dans les zones urbaines, les garçons travaillent comme cireurs de chaussures ou balayeurs de rue et certains effectuent des tâches dangereuses comme le transport d’objets lourds, qui pourraient entrainer des problèmes de santé à l’avenir. Les filles travaillent généralement comme domestiques ou comme vendeuses ambulantes de fruits ou d’eau. Dans les zones rurales, les garçons comme les filles travaillent dans les fermes (Newgarden, 2021). Les enfants âgés de 14 à 16 ans font généralement des travaux pénibles dans les industries comme la couture, la fabrication de briques ou la maçonnerie, souvent pendant de longues heures, dans des conditions immorales ou dangereuses. En outre, cela prive les enfants de leurs droits à l’éducation et entrave leur développement.
Un autre défi auquel la Gambie est confrontée est la prostitution des enfants. La CA 2005 interdit la prostitution et se conforme aux normes internationales, en prévoyant des sanctions graves pour la prostitution des enfants et les infractions du même genre (ECPAT International, 2015). Bien qu’il existe une définition claire de l’enfant comme toute personne âgée de moins de 18 ans, et que la loi stipule qu’aucun enfant n’est capable de contracter un mariage valide, cette disposition est soumise à toute loi personnelle applicable et il n’existe aucune loi fixant l’âge minimum du consentement sexuel (ECPAT International, 2015). En outre, bien qu’il existe des lois importantes pour protéger les enfants contre la prostitution, la mise en œuvre de ces lois reste partielle. Cela s’explique par le manque de moyens pour faire respecter les droits de l’enfant et par une méconnaissance générale de ces droits.
Mariage d’enfants et MGF/E (Mutilations génitales féminines ou excision)
Selon l’enquête MICS de 2018, 50,6% des filles de moins de 14 ans et 27,3% des filles de 0 à 4 ans ont subi une MGF/E (UNICEF, 2020). La Division de Upper River (actuellement La Basse), la région la plus rurale du pays, présente la plus forte prévalence de MGF, avec 96,7% des femmes âgées de 15 à 49 ans. Banjul, la région la plus urbanisée, a le taux de prévalence le plus faible, soit 47,4% (28TooMany, 2018). La loi (d’amendement) sur les femmes de 2015 a abordé la question des pratiques dangereuses pour la première fois en Gambie en introduisant la section 32A (Interdiction de circoncision féminine) et la section 32B (Complices à la circoncision féminine) (avis de la Gazette, 2015).
Bien que les MGF soient désormais reconnues comme illégales, cette disposition présente encore des défauts, car elle ne traite pas la question des MGF transfrontalières. Dans certains pays où les MGF sont illégales, la pratique a été poussée dans la clandestinité et au-delà des frontières pour éviter les poursuites (28TooMany, 2018). La Gambie est voisine du Sénégal, où la prévalence atteint encore 77,8 % dans certaines régions du sud, malgré une législation nationale interdisant cette pratique (28TooMany, 2018). Le déplacement des familles et des circonciseurs au-delà de la frontière pour pratiquer les MGF et éviter les poursuites judiciaires reste un problème dans toute l’Afrique de l’Ouest, auquel les filles vivant dans les communautés frontalières sont particulièrement vulnérables (28TooMany, 2018).
En ce qui concerne le mariage d’enfants, environ un tiers (34,2 %) des femmes âgées de 20 à 49 ans sont mariées avant l’âge de 18 ans (UNICEF, Protection de l’enfance). Alors que 8 % des filles sont mariées avant leur 15e anniversaire, les âges médians de mariage les plus bas se trouvent à Kuntaur et à Basse. L’article 28 de la CA 2005 stipule clairement qu' »aucun enfant n’est capable de contracter un mariage valide ». Elle est soumise au « droit personnel » qui comprend la Charia. La Charia stipule que les musulmans sont autorisés à se marier à la maturité physique, qui peut être avant 18 ans (ECPAT International, 2015). Cette situation est particulièrement alarmante étant donné que 90 % de la population gambienne est musulmane.
Pour des raisons culturelles et religieuses traditionnelles, les cas de mariage précoce ou forcé ne sont pas considérés comme inappropriés et ne sont souvent pas signalés, par souci de protection de la vie privée ou par crainte de stigmatisation sociale (ECPAT International, 2015). Un autre facteur contribuant aux mariages d’enfants est la pauvreté, car les filles issues de ménages pauvres sont plus susceptibles de se marier dès leur enfance (Girls not Brides, 2021). Les familles vendent environ 30 % des filles de moins de 18 ans pour les marier, en échange de bétail et d’autres biens matériels qui peuvent aider leurs familles (Newgarden, 2021).
Défis environnementaux
La Gambie est confrontée à plusieurs défis environnementaux. L’un d’eux est la sécheresse qui reste un risque naturel majeur avec une baisse d’environ 30 % des précipitations annuelles au cours des 30 dernières années (Africa and the World, 2021). Par conséquent, cela perturbe la production agricole et provoque une pénurie d’eau potable et d’eau à usage domestique dans plusieurs régions du pays. La déforestation, qui entraîne l’érosion des sols et la désertification, ne fait qu’aggraver d’autres problèmes déjà existants dans la plupart des régions du pays (Africa and the World, 2021).
Étant donné que la population rurale pauvre dépend de la disponibilité des ressources naturelles pour sa subsistance, un ensemble de questions lie étroitement la réduction de la pauvreté et la protection de l’environnement (Programme des Nations Unies pour le développement, 2021). Les efforts pour conserver les ressources naturelles et réduire la pollution risquent de ne pas aboutir si les populations locales n’ont pas la possibilité de se nourrir (Programme des Nations Unies pour le développement, 2021). La liaison entre la pauvreté de l’environnement et l’impact des changements et des variations climatiques sur les secteurs clés de l’économie de Gambie (c’est-à-dire la foresterie, la pêche, l’agriculture, les ressources en eau et l’énergie) constitue des obstacles pour relever les défis environnementaux de Gambie, ce qui est une condition préalable pour le développement économique.
Écrit par Igi Nderi
Traduit par Clément Collin
Dernière mise à jour le 6 janvier 2021
Références :
28TooMany. (2018). The Gambia: The Law and FGM. Banjul: 28TooMany.
ACERWC. (2020, December 2). Ratifications Table. Sourced from ACERWC.
Clark, A. (2020, December 2). The Gambia Introduction & Quick Facts. Sourced from Britannica.
ECPAT International. (2015). Global Monitoring status of action against commercial sexual exploitation of children, the Gambia. Bangkok: ECPAT International.
Gazette Notice. (2015). Women’s (Amendment) Act 2015. Banjul: Gazette Notice.
Girls not Brides. (2021, January 4). Gambia. Sourced from Girls not Brides.
Index Mundi. (2021, January 4). Gambia, the Economy Profile. Sourced from Index Mundi.
Ministry of Basic and Secondary Education (MoBSE). (2016). Early Childhood Development Policy 2016-2030. Banjul: MoBSE.
Multiple Indicator Cluster Survey. (2010). Final Report. Banjul: MICS.
Multiple Indicator Cluster Survey. (2019). Survey Findings Report, the Gambia. Banjul: MICS.
The Gambian Ministry of Basic and Secondary Education (MoBSE)/World Bank/UNESCO. (2010). Country Status Report. UNICEF.
UN Committee on the Rights of the Child (CRC). (2015). Concluding observations on the combined second and third periodic reports of the Gambia. UN Committee on the Rights of the Child (CRC).
UNICEF. (2011). The Republic of Gambia Country programme document 2012-2016. Executive Board.
UNICEF. (2020, December 16). Child Protection. Sourced from UNICEF, Gambia.
UNICEF. (2020, December 16). Child Survival and Development. Sourced from UNICEF Gambia.
UNICEF. (2020, December 14). Child Survival and Development. Sourced from UNICEF Gambia.
UNICEF. (2020, December 14). Education Gambia. Sourced from UNICEF.
UNICEF. (2020, December 14). Immunization. Sourced from UNICEF Gambia.
UNICEF. (2020, December 14). Maternal and Child Health. Sourced from UNICEF Gambia.
UNICEF. (2020, December 14). Nutrition. Sourced from UNICEF Gambia.
UNICEF. (2020, December 16). Water, Sanitation and Hygiene. Sourced from UNICEF Gambia.
[1] Cet article ne prétend nullement donner un compte rendu complet ou représentatif des droits de l’enfant en Gambie ; en effet, l’un des nombreux défis est le peu d’informations actualisées sur les enfants de Gambie, dont la plupart sont peu fiables, non représentatives, obsolètes ou simplement inexistantes.