Enfants d’Éthiopie

Concrétiser les droits de l’enfant en Éthiopie

Étant l’un des pays les plus peuplés d’Afrique, l’Éthiopie lutte pour répondre aux besoins des enfants, constituant la majorité de sa population. Combinés à une grande pauvreté, des problèmes tels que l’augmentation des mutilations génitales féminines, le manque de services de santé et d’assainissement, et la malnutrition constituent une grande menace pour les enfants.

Indice des Droits de l’Enfant: 4,98 / 10
Niveau noir: Situation très grave

Population : 109,2 millions
Pop. de 0 à 14 ans : 43,5 %

Espérance de vie : 66 ans
Mortalité des moins de 5 ans : 63.25 ‰

L’Éthiopie en bref          

L’Éthiopie est un pays enclavé de la Corne de l’Afrique. Ses voisins sont l’Érythrée, Djibouti, le Kenya et la Somalie. Sa population, qui s’élève actuellement à environ 109,2 millions d’habitants, ne cesse d’augmenter. C’est le pays le plus peuplé de la Corne de l’Afrique. Addis-Abeba en est la capitale, située au centre du pays. Le pays a encore une population relativement jeune, avec 43,5 % d’habitants de moins de 15 ans (2017). Il abrite également une grande variété de groupes ethniques composés d’une mosaïque de près de 100 langues différentes réparties en quatre groupes principaux.

L’Éthiopie est le plus ancien pays indépendant d’Afrique, ce qui lui a été salutaire car elle n’a pas eu besoin de relever les défis liés à une indépendance nouvellement établie. Cependant, elle a dû faire face à des défis tels que les conflits civils et les sécheresses dans les années 1990, et depuis, elle a grandement amélioré son économie. En outre, en raison de la transition vers la démocratie et des années de guerre civile, les disparités régionales se sont accrues et ont conduit à des insuffisances en matière de ressources et d’infrastructures, ce qui a entraîné un fonctionnement non optimal de nombreux services sociaux.

L’économie du pays repose en grande partie sur l’agriculture, qui contribue à près de la moitié de son PIB. L’industrie manufacturière et les sources d’énergie contribuent également fortement à l’économie du pays. La situation continue de s’améliorer considérablement.

Mais aujourd’hui, la pauvreté et les problèmes qu’elle engendre constituent une menace importante pour une plus grande partie de la population. La pauvreté entraîne des problèmes d’assainissement, d’accès à l’eau et aux services de santé, de malnutrition et de régime foncier, qui sont préjudiciables à la majorité de la population. En outre, l’Éthiopie est sujette aux chocs climatiques et aux épidémies.

Celles-ci ont eu des répercussions sur les enfants d’Éthiopie. En conséquence, certains enfants dans tout le pays ne peuvent pas jouir de tous les droits proclamés par la Convention internationale des droits de l’enfant. Toutefois, le gouvernement et les organisations non gouvernementales ont entrepris de grands efforts pour améliorer ces normes, ce qui aura des répercussions positives sur les enfants d’Éthiopie au fil du temps.

Statut des droits de l’enfant [1]

La population de l’Éthiopie est principalement composée d’enfants. L’âge médian n’est que de 17,9 ans, ce qui est très bas par rapport au reste du monde. Il est même prévu que d’ici 2050, il y aura 58 millions d’enfants en Éthiopie, soit 6 % de la population africaine.

En Éthiopie, 88 % des enfants, qui sont principalement concentrés dans les zones rurales, vivent dans une pauvreté multidimensionnelle et n’ont pas accès à au moins trois des besoins fondamentaux tels qu’une nutrition adéquate, l’éducation, la santé et le logement. Il existe de fortes disparités entre les zones rurales et urbaines en termes de prévalence des privations. La pauvreté rampante, à laquelle sont confrontés de nombreux enfants en Éthiopie, oblige de nombreux parents à empêcher leurs enfants d’aller à l’école pour qu’ils puissent travailler à plein temps et contribuer financièrement à la vie de la famille.

Une étude intitulée SITAN, menée en 2019, a révélé une amélioration des conditions générales des enfants par rapport à la décennie précédente. Il est évident que les droits de l’enfant sont de plus en plus reconnus par le public et le gouvernement s’efforce de les améliorer. Cependant, depuis l’adoption de la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant en 1991, peu d’engagements ont été pris en faveur des droits et de la vie des enfants d’Éthiopie.

Néanmoins, il existe des lacunes et des insuffisances dans les cadres politiques La mise en œuvre des programmes et la mentalité doivent être améliorées pour répondre correctement aux besoins des enfants en Éthiopie et leur donner la possibilité de jouir de tous leurs droits.  

Une protection sociale adaptée aux enfants

La protection sociale est essentielle pour prévenir et réduire la pauvreté des enfants et des familles, pour remédier aux inégalités et pour réaliser les droits des enfants. En outre, il est essentiel que les programmes de protection sociale répondent aux vulnérabilités des enfants en optimisant les effets positifs sur ces derniers et en minimisant les conséquences négatives potentielles. Compte tenu de sa contribution positive à la réduction de la pauvreté, de la vulnérabilité et des risques, la protection sociale a gagné en intérêt ces dernières années.

En particulier si une protection sociale adaptée aux enfants est mise en œuvre correctement, elle a la possibilité de s’attaquer à la pauvreté chronique, à l’exclusion sociale et aux chocs externes qui peuvent affecter les enfants de manière irréversible. Des programmes de protection sociale sont mis en place en Éthiopie, mais peu d’entre eux sont axés sur les droits de l’enfant.

Le programme central de travaux publics en Éthiopie prévoit des transferts directs de ressources aux membres de la famille physiquement incapables de travailler, y compris les enfants. Cette initiative a permis d’améliorer la nutrition des enfants en augmentant la quantité et la qualité des ressources alimentaires fournies aux familles. De même, le programme éthiopien de filet de sécurité productif a permis d’améliorer les inscriptions et les résultats scolaires des enfants issus de milieux pauvres.

Bien que certaines formes et politiques de protection sociale en Éthiopie en tant que telles soient de plus en plus adaptées aux enfants, elles sont encore inadaptées à leurs besoins. Il est évident que lorsque de tels programmes sont mis en œuvre, les enfants en bénéficient de manière significative. Il est donc important que les politiques, la législation et les règlements prennent effectivement en compte le point de vue des enfants et de ceux qui s’occupent d’eux afin que les droits des enfants soient respectés de manière adéquate.   

Répondre aux besoins des enfants

Droit à la santé

L’Éthiopie a de nombreux problèmes de santé, notamment le paludisme, le VIH/sida et la tuberculose. Ces problèmes sont principalement dus à une importante  malnutrition et au manque d’accès à l’eau potable et aux installations sanitaires.

L’espérance de vie moyenne est de 66 ans, et le taux de mortalité infantile est de 63,25 décès pour 1 000 naissances vivantes, ce qui est l’un des plus élevés au monde. Il existe un nombre limité de centres et de professionnels de la santé mais également une trop forte demande face aux ressources insuffisantes, ce qui rend l’accès aux soins très difficile, en particulier dans les régions rurales.

Une solution efficace est le programme d’extension des soins de santé, qui permet d’accéder aux soins de santé de manière rentable afin de remédier à la pénurie de médecins dans les régions rurales. Les agents du programme d’extension des soins de santé sont des personnes issues des classes inférieures de l’enseignement qui suivent un court programme de formation pour maintenir l’hygiène communautaire, l’assainissement, fournir des services de santé familiale et prévenir les maladies. Ce programme continue à bénéficier aux communautés et en particulier aux mères et aux enfants qui s’impliquent davantage et sont mieux informés sur la santé.

Droit à l’identité

En Ethiopie, il y a un nombre important d’enfants « invisibles », ce sont des enfants qui ne sont pas reconnus par la loi éthiopienne parce que leur naissance n’est pas enregistrée. Seuls 7 % des enfants éthiopiens ont des papiers officiels et sont officiellement déclarés aux autorités, principalement en raison de la difficulté d’accès aux services publics d’état civil et de la pauvreté.

L’insuffisance de la réglementation sur les naissances et la rareté des informations sur la nécessité d’enregistrer les enfants sont les plus grands obstacles à la réalisation d’un registre des naissances complet. Il est absolument nécessaire d’informer le grand public des problèmes que cela pourrait entraîner, tels que l’absence d’identité officielle, de nationalité, ou même le non-respect des droits et des besoins pratiques des enfants.

L’enregistrement des naissances est un droit fondamental, car il permet à l’enfant d’avoir un nom, un lien de parenté, une nationalité et un âge. Il représente également une preuve d’identité, un signe d’existence aux yeux de la société, leur accordant une protection automatique du gouvernement contre la traite et le travail forcé.

Droit à l’éducation

Comme l’a mentionné la Banque mondiale, l’Éthiopie est « l’un des pays les plus défavorisés au monde sur le plan de l’éducation » en raison des pénuries, des conflits et des crises. Depuis les années 1990, le système éducatif éthiopien s’est considérablement amélioré, mais au cours de la dernière décennie, il a été surchargé, ce qui a entraîné de nouveaux problèmes tels que la dépréciation des compétences et les manques de financement.

Le taux d’abandon scolaire est très élevé, ce qui se traduit par une diminution du passage de l’école primaire à l’école secondaire. Les disparités entre les sexes sont également très évidentes. En raison de la moindre valeur attribuée à l’éducation des filles, aux devoirs familiaux et aux attentes du mariage, il est très fréquent de voir plus de garçons que de filles dans l’enseignement secondaire. Les étudiants et leurs familles sont confrontés à des obstacles tels que les frais supplémentaires, les longues distances, l’hygiène, etc.

En outre, la qualité et l’adéquation de l’éducation restent un problème. Les cas de châtiments corporels, de mauvais traitements et même d’abus sexuels sont très préoccupants et le niveau d’éducation a baissé.

Facteurs de risques → Défis spécifiques au pays

Malnutrition et accès à l’eau

La malnutrition empêche des millions d’enfants éthiopiens d’atteindre leurs capacités maximales. La malnutrition constitue une menace importante, en particulier pour les enfants de moins de cinq ans. Le régime alimentaire de la plupart des enfants manque d’éléments nutritionnels de base, essentiels à une vie saine. Ces carences nutritionnelles ont un effet négatif sur leur système immunitaire et les rendent extrêmement vulnérables aux maladies.

En 2016, plus de 38% des enfants éthiopiens de moins de cinq ans souffraient d’un retard de croissance et beaucoup étaient en sous-poids, principalement en raison de la malnutrition, ouvrant ainsi la voie à une santé déficiente tout au long de la vie. En outre, l’accès à une eau propre et abondante est un défi pour de nombreux Éthiopiens. Selon le rapport du Programme commun de surveillance 2019, seulement 11 % de la population éthiopienne utilise de l’eau potable gérée de manière sûre, ce qui est plus fréquent dans les zones urbaines.

Il s’agit également d’une menace importante si l’on considère que cette source est essentielle pour l’assainissement, l’hygiène et la survie.

SIDA

Selon l’ONUSIDA, l’Éthiopie a le pourcentage le plus élevé d’orphelins du sida en Afrique subsaharienne, qui concerne environ 886 820 enfants. Il s’agit d’enfants qui ont perdu leur famille ou leurs soignants à cause du sida, ce qui les laisse orphelins par manque de ressources. Un petit nombre d’entre eux ont accès à des soins psychosociaux, éducatifs et diététiques, mais les efforts actuels sont insuffisants. Ces orphelins sont contraints de travailler dans les domaines le plus difficiles afin de répondre à leurs propres besoins.

Mutilations génitales féminines

Les mutilations génitales féminines (MGF) sont une pratique courante en Éthiopie. En 2018, la prévalence des mutilations génitales féminines chez les femmes âgées de 15 à 49 ans était de 65,2 %. Bien qu’encourager ou pratiquer les MGF soit passible de prison, de nombreuses personnes continuent à le faire. Cette pratique n’est pas aussi contrôlée et inspectée par les autorités dans les zones rurales que dans les zones urbaines.

Aujourd’hui, de plus en plus de parents prennent conscience des risques sanitaires liés à cette pratique. Certains districts ont lancé des campagnes pour abolir cette pratique, comme à Amibara et à Awash Fentale.

Le travail des enfants

Une grande partie des enfants éthiopiens sont engagés dans une activité économique, y compris des tâches très dangereuses dans l’agriculture. En général, les garçons sont envoyés dans les champs, tandis que les filles vendent des épices sur le marché ou travaillent comme domestiques. L’économie souterraine (prostitution, trafic de drogue ou de contrebande) est également un grand utilisateur du travail des enfants.

Les nombreux enfants qui vivent dans la rue ou qui ne poursuivent pas leurs études sont obligés d’apporter un revenu pour couvrir leurs besoins essentiels. Ces enfants mènent une existence misérable : longues heures de travail dans des conditions propices aux accidents, salaires de misère, carences alimentaires, manque de logement, etc. De plus, outre l’exposition aux éléments et aux maladies, ils sont chroniquement vulnérables à des dangers tels que la prostitution, la discrimination, la maltraitance, le trafic et la toxicomanie.

Trafic d’enfants

L’Éthiopie a l’un des taux les plus élevés de traite des esclaves au monde. Chaque année, des milliers d’enfants, dont certains n’ont pas plus de 10 ans, sont vendus par leurs parents. Selon l’Organisation internationale pour les migrations, les familles éthiopiennes pauvres vendent leurs enfants pour la modique somme d’environ 1,50 dollar américain.

Chaque année, de nombreux enfants éthiopiens sont contraints de travailler comme domestiques ou, plus fréquemment, dans le commerce du sexe ou le travail forcé dans les champs, les mines ou les usines de tissus. Le mariage des enfants est l’un des facteurs qui contribuent à ce commerce. En général, les jeunes filles sont exploitées sexuellement et les jeunes garçons sont forcés de travailler dans le tissage, l’agriculture et l’élevage.

En outre, de nombreux enfants éthiopiens sont adoptés illégalement. Les agences d’adoption font équipe avec les autorités nationales pour rassembler les jeunes Éthiopiens en vue de leur adoption à l’international.

Écrit par Yagmur Ozturk

Traduit par Mélaine Athimon

Relu par Marion Brasseur-Ordaz

Dernière mise à jour le 1 juin 2020

Références :

UNICEF, (2019) Ethiopia Annual Report 2019 (Rep.).

UNICEF, Children in Ethiopia.

UNICEF, & Central Statistical Agency. (2018). MULTIDIMENSIONAL CHILD DEPRIVATION IN ETHIOPIA (Rep.).

Kaplan, J., & Jones, N. (n.d.). Child-sensitive Social Protection in Africa (Rep.). THE AFRICAN CHILD POLICY FORUM (ACPF) and OVERSEAS DEVELOPMENT INSTITUTE (ODI).

WHO. (n.d.). GHO | Key Country Indicators | Ethiopia – key indicators.

Ouattara, D. N. (2019, February 9). The Reporter. Invisible Children.

Trines, S. (2019, March 19). Education in Ethiopia (WENR).

Global Nutrition Report. (2020, May 11). Ethiopia Nutrition Profile.

28 Too Many, & Thomson Reuters Foundation. (2018, July). ETHIOPIA: THE LAW AND FGM (Rep.).


[1] Cet article ne prétend nullement donner un compte rendu complet ou représentatif des droits de l’enfant en Éthiopie ; en effet, l’un des nombreux problèmes est le manque d’informations actualisées sur les enfants éthiopiens, dont la plupart sont peu fiables, non représentatives, dépassées ou simplement inexistantes.