Concrétiser les droits de l’enfant en Colombie
La République de Colombie a observé une réduction dans la violence contre les enfants ainsi que dans l’infanticide. Cependant, les cas de violence de genre ont augmenté à cause des mesures de confinement imposées afin de limiter la propagation de la Covid-19.De plus, les populations autochtones et afro-colombiennes ne cessent de subir de discriminations, de déplacements infantiles forcés ainsi que de grandes inégalités entre les enfants vivants dans les zones urbaines et ceux vivant dans les zones rurales.
Indice des Droits de l’Enfant: 7.22/10
Niveau rouge : Situation difficile
Population : 51 512 766
Pop. de 0 à 14 ans : 22,184 %
Espérance de vie : 77,287 années
Mortalité des moins de 5 ans : 13,2 ‰
La Colombie en un coup d’œil
La République de Colombie se trouve dans le nord-ouest de l’Amérique de Sud. La côte nord fait face à la mer des Caraïbes et la côte ouest à l’océan Pacifique. Le pays a des frontières avec le Panama, qui sépare les deux mers, le Venezuela au nord-ouest, le Brésil à l’est et le Pérou et l’Équateur au sud (Gravito, 2022).
Après avoir commencé la colonisation des Caraïbes, les Espagnols ont étendu leur empire vers le continent au début du XVIe siècle. Peu après, l’Espagne commença la colonisation de la Colombie en fondant la ville de Santa Marta en 1525 suivie par Cartagena en 1533, le Royaume de Nouvelle-Grenade en 1535 et Cali en 1536. Lorsque des maladies issues de l’Europe telles que la variole ont réduit la population autochtone des Caraïbes, des esclaves ont été emmenés de l’Afrique.
La domination espagnole a duré de 1525 jusqu’à 1808. Pendant ce temps, l’Audience royale de Santa Fe de Bogotá a contrôlé la région du Royaume de Nouvelle-Grenade (Infoplease, 2016). Le Royaume de Nouvelle-Grenade comprenait ce qui est aujourd’hui la Colombie, l’Équateur, le Panama et le Venezuela.Le Venezuela et l’Équateur ont quitté le Royaume de Nouvelle-Grenade en 1829 et en 1830, respectivement.
En 1861, le pays était appelé les États-Unis de Nouvelle-Grenade, en 1863 il a été dénommé les États-Unis de Colombie et en 1855 il est devenu la République de Colombie. En 1899, une guerre civile a éclaté, connue sous le nom de la Guerre des Mille Jours, et a duré jusqu’à 1902.Le Panama a acquis son indépendance en 1903 à l’aide des États-Unis. Cependant, la Colombie ne l’a reconnue qu’en 1921 après avoir reçu une réparation de 25 millions de dollars des États-Unis (lexplore, 2015).
La Colombie a retrouvé un état relativement stable jusqu’à que des groupes de guérilla marxistes organisés dans les années 60-70, notamment le mouvement du 19 mai (M-19), l’Armée de libération nationale et les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) ont jeté le pays dans la violence et l’instabilité (lexplore, 2015). La période allant de 1970 à 1990 a témoigné une émergence de cartels violents et puissants, notamment à Medellín et à Cali qui ont influencé la société colombienne en altérant considérablement sa politique et son économie.
En 1991, une nouvelle constitution a été ratifiée. Elle interdisait l’extradition des colombiens jusqu’à ce que la disposition n’a été abrogée en 1996. Malgré les réformes, la Colombie a continué à être influencée par des clans illégaux et par la violence liée au marché de la drogue, ce que le président AndrePastrana a essayé de limiter entre 1999 et 2002. Uribe a été élu président en 2002 et ses opérations intenses pour la sécurité contre les FARC ont été efficaces puisque le nombre de crimes, de kidnappings et d’attaques terroristes en Colombie a réduit considérablement pendant sa présidence. (Garavito, 2022)
Le 15 août 2017, le gouvernement colombien a officiellement déclaré la fin de son conflit avec les FARC et leur dernier stock d’armes accessibles a été rendu aux représentants de l’ONU (Garavito, 2022).La Colombie a vécu une histoire turbulente marquée par l’esclavage et l’appropriation de terres autochtones pendant la période coloniale suivie par l’instabilité politique, une guerre civile et des violences liées au marché de la drogue durant ces dernières années. Toutefois, la culture homogène présente est le résultat d’un mélange artistique de coutumes espagnoles, de patrimoines tribaux et de traditions afro-caribéennes. (lexplore, 2015)
Le statut des droits des enfants [1]
Le 28 janvier, 1991 (Haut-Commissariat des droits de l’homme de l’ONU, 2020), la République de Colombie a ratifié la Convention internationale des droits de l’enfant des Nations Unies (ci-après la CDE de 1989) et l’a incorporée dans la loi nationale. Le 25 mai, 2005 (Haut-Commissariat des droits de l’homme de l’ONU, 2020), la Colombie a également ratifié le Protocole facultatif concernant l’implication des enfants dans les conflits armés et le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants le 11 novembre, 2003 (Haut-Commissariat des droits de l’homme de l’ONU, 2020). Cependant, la Colombie n’a toujours pas ratifié le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, 2011.
Sur échelle régionale, la Colombie a ratifié la Convention américaine relative aux droits de l’homme, Pacte de San José (1969) (ci-après Pacte de San José) le 18 août, 1978 (UNTC, 1969). Le but du Pacte de San José est d’établir des réglementations internationales définissant les rôles des états dans la défense des droits humains tels que le droit à la vie.
De plus, l’article 19 reconnaît l’importance de la protection des enfants en détaillant que « tout enfant a le droit aux mesures de protection requises par son statut de mineur de la part de sa famille, de la société et de l’état ». (UNTC, 1969) Il est essentiel que les organismes régionaux coopèrent entre eux afin de garantir la réalisation des droits des enfants dans l’État parti ainsi que dans les autres pays membres du Pacte de San José.
Sur échelle nationale, la Colombie possède une structure législative solide et élargie établissant des mesures de protection précises liées aux droits des enfants. La législation nationale colombienne concernant les enfants a évolué au fil des années, notamment en raison des différentes conceptions qui formulaient ce qui devrait être indiqué dans une telle législation. D’après la constitution colombienne de 1991, notamment après les modifications survenues jusqu’en 2015, l’article 44 renseigne sur les droits des enfants et exige qu’ils soient prioritaires à ceux des autres. (Institut Max Planck, 2021)
Dans les articles 42 et 45, il y a d’autres dispositions qui traitent directement les droits des enfants. La Colombie a un Code sur les enfants et les adolescents qui a été adopté en 2006 et qui inclut le CDE de 1989 en tant que partie intégrante du Code afin de s’y référer dans son interprétation et son application.
Le pays présente également d’autres lois liées aux droits des enfants telles que la Loi de prévention de la violence sexuelle et la Charte intégrale des enfants victimes d’exploitation sexuelle, 2007. De plus, la Colombie a adopté une série de politiques concernant la protection des enfants, y compris le Plan d’action national pour les enfants et les adolescents (2009-2019), le Plan de développement (2014-2018) et la Politique sur la petite enfance.
Évaluation des besoins des enfants
Droit à l’éducation
Au cours des deux dernières décennies, le système d’éducation colombien a vécu une profonde transformation (Organisation de coopération et de développement économiques, 2016). Le résultat le plus visible est l’expansion considérable de l’accès à tous les niveaux d’étude résultant de politiques ambitieuses ayant pour but de réduire les obstacles dans la scolarisation et d’apporter l’éducation partout dans le pays.
La scolarisation a nettement augmenté dans tous les niveaux d’étude. En seulement dix ans, le temps dédié par les étudiants à l’éducation a augmenté de deux ans. La participation dans l’éducation préscolaire et dans l’enseignement supérieur a plus que doublé, à 40 % et à 50 % respectivement (Organisation de coopération et de développement économiques, 2016). De plus, la scolarisation des enfants de 0 à 5 ans a plus que doublé entre 2007 et 2013, de 16 % à 41 %.
Malgré ces améliorations, le système d’éducation colombien fait face à des enjeux majeurs. L’espérance de vie scolaire pour les étudiants venant des milieux les plus pauvres n’est que de 6 ans, comparée à 12 ans de ceux provenant des milieux les plus riches. Il existeune différence considérable dans la couverture de l’enseignement qui touche notamment les enfants autochtones, afro-colombiens, déplacés et ceux qui habitent dans les zones rurales, et qui a une incidence disproportionnelle sur les filles (Convention relative aux droits de l’enfant, 2015). Il existe également une faille stratégique qui empêche d’atteindre une éducation inclusive pour les enfants handicapés.
Les données recensées en 2014 et en 2015 par le système d’inscription du ministère de l’Éducation sont alarmantes lorsque les personnes présentant des handicaps sont concernées. L’inscription de personnes handicapées en 2014 représentait 1,21 % des personnes scolarisées, ces données sont plus grandes pour l’enseignement public (1,72 %) et plus faible (0,77 %) pour l’enseignement privé (Fondation Saldarriaga-Concha, 2016).
Le taux d’inscription moyen est plus élevé chez les hommes que les femmes présentant des handicaps à tous les niveaux scolaires. En 2014, les femmes représentaient 0,96 % des personnes handicapées inscrites dans le système scolaire, alors que les hommes en représentaient 1,46 % (Fondation Saldarriaga-Concha, 2016). En 2015, les femmes représentaient 1,04 % des personnes handicapées inscrites dans le système scolaire, alors que les hommes en représentaient 1,63 %.
Les effets de la pandémie de la Covid-19 a imposé la fermeture des écoles ce qui a forcé plus de 9 millions d’élèves de maternelle jusqu’au collège à suivre les cours depuis chez eux en ligne, à la radio ou par des émissions télévisées (Trines et al., 2020). Une forte réduction des inscriptions dans l’enseignement supérieur était prévue à cause d’une perte de revenus familiaux allant jusqu’à 50 % (Trines et al., 2020).
Droit à la santé
La Colombie a adopté une loi en 2015 (Loi 1751) qui reconnaît le droit constitutionnel à la santé en relation avec le droit à la vie et à la dignité (Gómez, 2018, 133-145). Le ministère de la Santé et de la Protection sociale a développé un plan de santé publique de 10 ans en réponse aux problèmes de santé des enfants de Colombie (Ministerio de Salud y Protección Social, 2014). Il établit trois priorités pour des services de santé exhaustifs: tolérance zéro pour la mortalité, la morbidité et les handicaps évitables.
Cette initiative a eu un impact positif: depuis la dernière décennie, la mortalité infantile a vu une réduction en passant de 20,4 morts par 1 000 naissances à 17,7 morts (Ministerio de Salud y Protección Social, 2014).La mortalité par maladie diarrhéique aiguë a également vu une réduction dans ce pays, en passant de 33,8 morts par 100 000 enfants de moins de 5 ans à 3,7 morts. Le même phénomène est observé chez les enfants atteints d’infection respiratoire aiguë, en passant de 35,3 morts à 15,9 morts.
Les taux de mortalité infantile et maternelle restent très importants, notamment chez les populations autochtones, afro-colombiennes, et vivantes dans les zones rurales (Convention relative aux droits de l’enfant, 2015). Il existe encore des cas de décès chez les enfants de moins d’un an causés par des maladies respiratoires survenant dans la période prénatale; les malformations congénitales du système respiratoire et les infections prénatales, notamment dans les régions des Amazonas, de Chocó et de Vaupés, enregistrent les taux de mortalité infantile les plus élevés. De plus, 13,3 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de malnutrition chronique et 3,4 % souffrent de malnutrition générale (Ministerio de Salud y Protección Social, 2014).
En ce qui concerne la santé des adolescents, le taux de grossesses adolescentes est très élevé, notamment dans les zones rurales, touchant des filles même plus jeunes de 15 ans (Convention relative aux droits de l’enfant, 2015). Par conséquent, le taux de mortalité maternel parmi les adolescentes est aussi élevé et résulte d’un manque d’accès aux services de santé sexuelle et reproductif. Cependant, en 2021, les enfants et les familles de Colombie ont vécu des effets positifs grâce à l’étendue de la vaccination contre la Covid-19, à la réouverture des écoles ainsi qu’à la mise en place d’une campagne pour l’immunisation contre la rougeole et la rubéole pour les enfants de moins de 10 ans (UNICEF, 2022).
Droit à l’eau et à la santé
En Colombie, 1,4 million de personnes n’ont pas d’accès à l’eau potable. Cela représente environ 3 % de la population. Il y a un grand écart entre les populations des zones urbaines et rurales et leur accès à l’eau potable (Embry, 2020). Dans les zones urbaines, les services essentiels d’approvisionnement en eau fournissent 98,8 % de la population contre 86 % dans les zones rurales (Bluma, 2020, 25).
Le gouvernement colombien prévoit d’étendre l’accès à l’eau (Groupe de la Banque mondiale, 2019) dans les zones rurales telles que la Guajira d’ici 2024. De plus, en 2019, plus de 8 000 personnes autochtones (Miller, 2019) vivant dans les zones rurales de la Colombie ont pu accéder aux services essentiels d’approvisionnement en eau grâce au développement de réservoirs et d’infrastructures auxiliaires.
À cause du manque d’accès aux installations d’eau potable et d’assainissement, 2 % du PIB national est versé dans des frais liés à la santé.En 2016, 366 morts (Organisation mondiale de la santé, 2019) ont été causés par de mauvaises conditions d’hygiène et de l’eau en Colombie. En 2012, 119 morts parmi des enfants de moins de 5 ans ont été causés par le manque d’accès à l’eau et aux services d’assainissement (Organisation mondiale de la santé, 2019). Selon les estimations, en Colombie 4,9 millions de personnes (WaterAid, 2020) n’ont pas accès à des toilettes.
Dans les zones rurales, 3 personnes sur 10 n’ont pas accès à des installations sanitaires appropriées. UNICEF a déterminé que seulement une école sur cinq avait du savon et du papier toilette disponibles pour les élèves (WaterAid, 2020).En 2015, 88,2 % de la population avait accès aux services essentiels d’assainissement contre 85,6 % en 2000; il s’agit d’une amélioration faible sur une période de 15 ans (Bluma, 2020, 26). Il y a eu une augmentation considérable des services essentiels d’assainissement dans les zones rurales de la Colombie, qui a atteint un taux de 72 % (Bluma, 2020, 27).
Avec la propagation de la Covid-19, la provision d’eau potable, d’assainissement et de conditions d’hygiène est devenue un facteur essentiel pour la protection de la santé humaine. Les populations minoritaires de la Colombie, dont les descendants d’Africains, les communautés autochtones, palanqueros et d’autres font partie des groupes le plus durement touchés (Rocha et al., 2020).
Cela est particulièrement inquiétant puisque la Court constitutionnelle colombienne, à travers plusieurs ordonnances, a garanti à l’accès à l’eau potable le statut de droit fondamental. Il existe également d’autres problèmes liés à l’accès à l’eau causés par le manque de reconnexion dans les foyers. Souvent, les personnes qui ne peuvent accéder à l’eau potable que par des raccordements illégaux vivent sous le seuil de pauvreté (Rocha et al., 2020).
Droit à l’identité
En Colombie, l’enregistrement des naissances est gratuit et son processus est généralement effectué au sein de la ville de naissance de l’enfant. Lors de son enregistrement, l’enfant se voit attribuer un numéro d’identification personnel (NUIP) (Convention relative aux droits de l’enfant, 2015). Ce numéro est propre à l’enfant, et ses empreintes sont également enregistrées lors de la démarche d’enregistrement de la naissance.
Le droit à la reconnaissance en tant que personne devant la loi est une étape essentielle pour garantir une protection à vie et est également un prérequis pour la réalisation de tous les autres droits (UNICEF, 2021). L’enregistrement est une preuve qui peut être utilisée pour accéder à des services tels que l’éducation et les services de santé ainsi que pour documenter l’âge de l’enfant.
Les enfants autochtones et afro-colombiens font toujours face à des discriminations et à de nombreuses difficultés dans l’accès à l’éducation, aux services de santé, aux services d’état civil et à la justice (Convention relative aux droits de l’enfant, 2015). Ils sont touchés de façon disproportionnelle par la violence et les conflits armés; ces enfants sont recrutés par des groupes armés non étatiques.
Facteur de risque → Enjeux spécifiques à chaque pays
Enfants dans les conflits armés
La conclusion de l’accord final pour la fin du conflit et la construction d’une paix stable et à long terme entre le gouvernement colombien et les Forces armées révolutionnaires de Colombie et la transformation des Fuerzas Armadas Revolucionarias de Colombia-Ejército del Pueblo (ci-après FARC-EP) en un parti politique (Conseil de sécurité des Nations unies, 2017) a mis fin à un conflit qui a duré cinq décennies et a porté à la démobilisation des FARC-EP et à sa transformation en un parti politique.
Cependant, la violence et l’insécurité liées aux forces armées cherchant à exercer le contrôle dans les zones évacuées par les anciennes FARC-EP continuent à affecter les droits et le bien-être des enfants (Conseil de sécurité des Nations unies, 2019). Entre juillet 2016 et juin 2019, l’équipe spéciale de pays a vérifié 850 violations graves perpétrées contre les enfants, ce qui représente une réduction par rapport aux 2 078 violations graves qui ont été vérifiées entre septembre 2011 et juin 2016.
Le recrutement et l’utilisation des enfants étaient la violation grave vérifiée la plus dominante, en atteignant un sommet en 2018. Les enfants, entre 13 et 17 ans, dont cinq enfants du Venezuela, ont été recrutés. Leur recrutement et leur utilisation de la part de l’Ejército de Liberación Nacional (ci-après, le ELN) ont atteint le sommet en 2017, en visant souvent les enfants des communautés autochtones. À titre d’exemple, en février 2017, cinq enfants autochtones entre l’âge de 14 et 17 ans ont été recrutés par le ELN et en juin 2017, sept enfants autochtones, dont quatre filles, ont été recrutés et utilisés par le ELN.
Au sein de ces groupes armés, des stratégies de recrutement des enfants sont mises en place: elles comportent des promesses d’argent et de protection ou d’autres formes de support et de bénéfices pour leurs familles. Les filles étaient souvent victimes de violences sexuelles durant leur association avec les groupes armés.
De juillet 2016 à juin 2019, il y a eu des signalements du meurtre de 91 enfants et de la mutilation de 95 enfants, dont certains étaient aussi jeunes que 5 ans.Le décès de ces enfants était le résultat de tirs croisés, d’attaques aveugles, d’attaques les visant directement, d’explosions ainsi que d’accidents causés par des mines terrestres antipersonnelles et des munitions non explosées. Les enfants associés avec ces groupes armés ont été tués ou mutilés pendant les attaques.
Les enfants ont été exposés à des violations graves, notamment le recrutement et les violences sexuelles, et ont vu leur accès à l’éducation et aux services médicaux durement touché. Les communautés afro-colombiennes et autochtones ont été particulièrement marquées par cette violence qui met leur survie en danger (Sardiza& García, 2017). Ces deux groupes ethniques représentent respectivement 47 % et 25 % de la population totale qui a été déplacée en masse en Colombie en 2017. Historiquement, ces groupes ethniques représentaient respectivement 10 % et 3 % des 7,4 millions des personnes déplacées à l’intérieur du pays (ci-après les IDP).
Déplacement forcé
La Colombie a traversé plusieurs décennies de conflit qui ont abouti au déplacement forcé de familles entières et qui ont eu des répercussions directes sur les jeunes garçons et filles. Les conséquences plus graves sont la migration, puisque les enfants et leurs familles sont souvent forcés de quitter ces zones de conflit, ainsi que le recrutement d’enfants où ils sont forcés à participer directement au conflit, les conduisant inévitablement à la mort.
La plupart des enfants de Colombie déplacés sont afro-colombiens ou d’origines autochtones. Plus particulièrement, ce sont les filles déplacées qui sont le plus exposées à la violence et à la discrimination, et ce problème n’a toujours pas été adéquatement abordé (Convention relative aux droits de l’enfant, 2015).
Selon l’UNICEF, environ 520 000 sont les enfants déplacés résultant du conflit armé (Pettersson, 1996). Les conflits armés perturbent la structure familiale et il en résulte une situation de déplacement qui a des effets perturbateurs et destructeurs sur la famille (Soto &Niños, 1999). Selon les estimations, 60 % des enfants déplacés ont été forcés de s’exiler avec d’autres membres de leurs familles, tandis que 63 % d’entre eux ont déclaré avoir au moins un membre de leur famille qui a été tué ou qui a presque perdu sa vie.
En ce qui concerne la qualité de vie, un enfant déplacé est généralement en situation de besoin, puisque ses parents n’ont pas d’emploi ou parce qu’il souffre de malnutrition, de maladies ainsi que pour d’autres raisons qui peuvent empirer gravement la qualité de vie des enfants.
Travail des enfants
La Colombie a fait des efforts afin d’éliminer les formes plus graves de travail des enfants. Le Code sur les enfants et les adolescents établit que l’âge minimal pour travailler soit de 15 ans (Gouvernement de Colombie, 2006). Il faut également qu’un inspecteur du travail ou un fonctionnaire du gouvernement local concerné donne l’autorisation pour travailler aux adolescents âgés entre 15 et 17 ans. Le Code sur les enfants et les adolescents détermine que l’âge minimal pour participer aux travaux dangereux soit de 18 ans.
Le Code du travail interdit explicitement aux mineurs de travailler dans les mines souterraines et dans le domaine de la peinture industrielle (Gouvernement de Colombie, 1951). Le 2 février, 2001, la Colombie a ratifié la convention 138 de l’Organisation internationale du travail (ci-après OIT) sur l’âge minimum d’admission à l’emploi (Organisation internationale du travail, 2001) et la convention 182 de OIT sur les pires formes de travail des enfants (Organisation internationale du travail, 2005) le 28 janvier, 2005.
Les enfants de Colombie pratiquent les pires formes de travail des enfants, dont l’exploitation sexuelle commerciale, les travaux agricoles et les travaux de rue. Dans le secteur agricole, les enfants travaillent pendant de longues heures, sont exposés aux éléments et à des taux de particules fines importants, pratiquent des tâches physiquement astreignantes, utilisent des équipements dangereux et font face à un grand risque d’accident de travail (Centre international pour l’éducation et le développement humain (CINDE), 2006, 3).
Ils travaillent dans la production de café, de canne à sucre et de coca, un stimulant illégal. Les enfants sont également impliqués dans l’exploitation minière artisanale et sont exposés à des gaz toxiques, à de longues heures de travail, à des explosifs et à des composants chimiques dangereux tels que l’acide nitrique. Ils travaillent dans des mines d’émeraude, d’or, d’argile et de charbon. Ils cassent des pierres, creusent dans la saleté avec des bâtons ou à mains nues, évacuent l’eau des mines et soulèvent des charges lourdes (Andi, 2012).
Les enfants travaillent dans les rues dans les zones urbaines où ils peuvent être exposés à de longues heures de travail, aux éléments, aux risques de blessures physiques et aux braquages. Ils soulèvent des charges lourdes dans les marchés et ils participent à la vente ambulante (Conseil municipal de Bogotá, 2012). Les enfants sont également impliqués dans les processus de recyclage où ils sont exposés à des substances toxiques telles que le plomb et l’acide sulfurique ainsi qu’aux déchets dangereux (Conseil municipal de Bogotá, 2012).
En Colombie, les enfants sont impliqués dans les services domestiques.Les familles autochtones dans les zones rurales envoient souvent leurs enfants dans les foyers urbains pour travailler en tant que personnel domestique. Les employés de maison enfants travaillent jusqu’à 12 heures par jour et effectuent des tâches ménagères telles que le repassage, le nettoyage et la cuisine.
Les enfants qui travaillent dans les services domestiques sont vulnérables aux abus physiques et sexuels de la part de leurs employeurs. On a découvert que 2 117 enfants étaient impliqués dans l’exploitation sexuelle commerciale au sein de onze villes en Colombie (Plan international et al., 2014). Les enfants prennent également part à la pornographie infantile et au tourisme sexuel. Ils sont trafiqués dans le but d’être exploités sexuellementau sein du pays et à l’international (US Department of State, 2019).
Enjeux environnementaux
D’après le Climate Action Tracker, le plan national de la Colombie visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre est largement insuffisant pour atteindre le but de l’accord de Paris de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C au-dessus des niveaux préindustriels (Roth, 2022). Avec ce plan, la Colombie s’engage à réduire la déforestation à 50 000 hectares par an d’ici 2030.
Deux tiers de la destruction forestière prend place dans la région amazonienne, influencée par les éleveurs de bétail et les groupes dissidents des FARC qui poussent les résidents locaux à couper les arbres, extorquent les agriculteurs, encouragent la plantation de champs de coca pour la production de cocaïne et menacent les personnes qui défendent les initiatives de conservation.
En novembre 2021, à l’occasion du sommet pour le climat tenu à Glasgow, COP26, le gouvernement colombien s’est engagé à déclarer 30 % du territoire du pays une zone protégée en 2022 (Roth, 2022).Ce chiffre s’élevait à 15 %. Le changement climatique cause l’augmentation de la température et la sécheresse et pourrait engendrer des précipitations extrêmes et des inondations.
Le gouvernement serait donc tenu de prendre des mesures et protéger les populations à risque de leurs dégâts prévisibles. La réponse inappropriée des autorités face à la sécheresse prolongée qui a lieu dans la région de La Guajira, au nord-est du pays, a compromis l’accès de la population autochtone de Wayuu à l’alimentation et à l’eau. Il en résulte une augmentation du nombre d’enfants mal nourris et de leur décès.
Écrit par Igi Nderi
Traduit par Isslam Belgacem
Relu par Denis Gingras
Dernière mise à jour le 22 mars 2022
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[1] Cet article ne prétend en aucun cas de décrire de manière complète ou représentative les droits des enfants en Colombie ; en effet, l’un des enjeux rencontrés est l’actualisation insuffisante d’informations sur les enfants, dont une grande partie n’est ni fiable, ni représentative, ni récente.